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Les réunions font partie du cours normal des affaires, mais elles ne donnent pas toujours les résultats espérés. C’est qu’on méconnaît trop souvent leur importance. Voici donc quelques conseils pour rendre vos réunions plus fructueuses et améliorer votre productivité…

Dans les affaires, de nos jours, presque toutes les décisions importantes sont prises au cours de réunions. Dans les circonstances, il est étrange que la réunion d’affaires soit si rarement perçue comme complètement différente du meeting type des groupements politiques ou communautaires. Les écrits qui traitent du sujet vous expliquent comment tenir une assemblée à votre club de golf ou comment organiser un dîner avec un conférencier invité, mais ils n’ont pas grand-chose à dire sur la manière de tenir ces conférences informelles qui ont lieu tous les jours dans les bureaux et les usines.

La différence, pourtant, est bien réelle. Les réunions d’un club ou d’une commission scolaire rassemblent des représentants élus qui se rencontrent régulièrement et sont obligés, plus ou moins, d’observer leur règlement interne. Les réunions d’affaires sont souvent convoquées au pied levé et mettent en présence des équipes improvisées de gestionnaires et d’agents de maîtrise. La plupart des réunions d’affaires sont informes par nature.

Le moyen d’être efficace dans des conditions pareilles n’est mentionné nulle part ; on semble tenir pour acquis que c’est affaire d’aptitude. Nombre d’entreprises n’ont aucun règlement ou directive concernant l’organisation des réunions, et la formation à ce sujet est très souvent absente du programme des cours de gestion. C’est comme s’il suffisait de s’assurer qu’il y a suffisamment de chaises pour qu’une réunion soit réussie.

Vu cette attitude, il n’est guère surprenant que beaucoup de gens d’affaires doutent de l’utilité des réunions. Même les cadres supérieurs qui passent une grande partie de leurs journées à présider des réunions sont enclins à les considérer avec scepticisme. Lors d’un sondage réalisé l’année dernière par Communispond Inc., de New York, auprès de 471 cadres américains, 71 pour cent des répondants se sont accordés pour dire que les réunions étaient « une perte de temps » et 63 pour cent ont précisé qu’ils les « toléraient » tout au plus.

Étant donné ce que les gens peuvent accomplir en joignant leurs efforts, on peut déplorer que des hommes d’affaires, surtout s’ils occupent des postes de commande dans l’entreprise, aient une si mauvaise opinion des réunions. Dans un groupe bien dirigé, les énergies individuelles agissent de concert en vue d’un but commun. C’est à cette action coordonnée que devrait tendre toute réunion visant à produire des idées ou une décision.

Pourquoi est-on à ce point désabusé des réunions ? Peut-être d’abord parce qu’il y en a trop qui sont vraiment inutiles, remarque qui soulève une question fondamentale : qu’est-ce qu’une réunion ? C’est le fait pour deux personnes ou plus de s’associer pour faire ensemble ce qui ne peut pas être fait par une personne seule. Il y aurait beaucoup moins de réunions inutiles si les gestionnaires prenaient plus souvent la peine de se demander s’ils ne pourraient pas obtenir les mêmes résultats avec une note de service ou avec un ou deux coups de téléphone.

Si une réunion est justifiée, tous les intéressés doivent savoir à l’avance pourquoi elle est convoquée et ce qu’on attend d’eux. Si, par exemple, une décision a déjà été prise et que l’objet de la réunion est de les en informer et de discuter des moyens d’exécution, personne ne doit avoir l’impression que la décision peut être remise en question.

Une des plaintes les plus fréquentes au sujet des réunions d’affaires est que les participants sont mal préparés, qu’ils se présentent sans avoir étudié le dossier ni même anticipé les questions possibles. On pourrait régler ce problème au moins partiellement en donnant à chacun un avis suffisant dans lequel on mentionnerait le motif de la réunion, les points à examiner et la contribution attendue. Même si l’on ne peut pas obliger tout le monde à réfléchir d’avance au sujet proposé et à faire les recherches appropriées, le fait de donner un avis préalable, accompagné d’explications pertinentes, est un bon moyen de s’assurer qu’ils apporteront au moins la documentation nécessaire.

Toujours préparer un ordre du jour et désigner un président

La personne qui convoque l’assemblée devrait accorder une attention particulière à la liste des participants et, si elle le peut, inviter seulement les gens dont la présence est motivée. Dans le cas d’un comité officiel, il faut observer l’étiquette, mais lorsqu’il s’agit d’une réunion d’affaires, il vaut mieux laisser de côté les gens qui n’ont rien à contribuer aux délibérations. Par contre, on ne doit omettre personne qui s’intéresse sincèrement aux affaires à traiter.

Il n’y a rien comme un ordre du jour pour structurer une réunion, même s’il se résume à quelques lignes tapées à la hâte, énumérant les matières à considérer. C’est toujours une bonne idée de le distribuer à l’avance si on a le temps ; autrement, on pourra le remettre aux participants à leur arrivée dans la salle de réunion ou encore, faute de temps même pour cela, demander au président d’exposer verbalement le plan de la discussion.

Cette dernière recommandation nous amène à préciser que, sauf pour les réunions peu nombreuses et très brèves, il faut désigner un président qui veillera à ce que tout se passe en bon ordre. Il suffit alors que quelqu’un dans l’assistance propose qu’un autre participant préside le débat.

Le président doit voir à ce que la réunion débute à l’heure ou dès qu’il y a suffisamment de monde. En effet, s’il y a une dizaine de personnes, un délai de 15 minutes représente plus de deux heures-hommes de perdues. Les retardataires devront se contenter d’un bref résumé de ce qui s’est dit avant leur arrivée ; cette façon de souligner leur retard les encouragera peut-être à plus de ponctualité la prochaine fois.

Demander des motions pour circonscrire et jalonner le débat

La réunion ne doit pas seulement commencer à l’heure, mais aussi se terminer à l’heure. Même si, en principe, elle doit durer assez longtemps pour atteindre son but, le président peut fort bien proposer une limite de temps : « J’aimerais que tout soit terminé à 3 h 30, si possible ». Il peut y avoir de bonnes raisons de prolonger la séance mais, la plupart du temps, l’ordre du jour est épuisé dans les délais prévus.

Le président devrait limiter le temps accordé à chaque question afin que toutes reçoivent l’attention qu’elles méritent. Il arrive très souvent qu’on s’attarde sur les premiers points à l’ordre du jour, puis qu’on bâcle ensuite ceux qui restent ; en suivant un horaire tout de même assez souple, le président peut s’assurer que la discussion progresse. S’il veut ensuite empêcher qu’on saute des articles, il insistera pour aborder chacun à tour de rôle.

Au risque de paraître plein de son importance, le président peut invoquer l’usage des assemblées délibérantes pour demander une motion lorsqu’il a l’impression qu’on a fait le tour d’un sujet. Il lui suffit alors de demander à la personne qui a la parole si elle est prête à proposer l’adoption de ses suggestions. Les motions ont pour effet de circonscrire et de jalonner le débat et le grand avantage de conduire aux actes.

Ayant réglé l’allure de la discussion, le président doit voir à ce qu’elle ne s’égare pas. Ce n’est pas le plus facile de sa tâche étant donné la propension de certaines personnes à s’écarter du sujet. Le président doit alors s’enquérir avec tact du rapport entre ce qui est en train de se dire et la question à l’examen.

S’il y a pire que la prolixité pour troubler la bonne marche d’une réunion, c’est la présomption de celui qui cherche à dominer la discussion. Devant un représentant de cette espèce, le président peut essayer de le faire taire en s’adressant à un autre participant : « Et vous, Jean, qu’est-ce que vous en pensez ? » Si le fâcheux revient à la charge, le président doit renoncer aux circonlocutions. Il peut alors faire remarquer que le temps passe et que les autres aussi doivent avoir l’occasion de dire ce qu’ils pensent.

Décourager les apartés et réduire le comique du bureau au silence

Dans le cas des réunions d’affaires, la règle voulant que chacun ait le temps de parler relève moins de la justice que d’un judicieux principe de gestion. Après tout, le but de la réunion est de faire appel à l’expérience, au jugement, aux connaissances et au savoir-faire de tous les participants. Pour s’assurer la contribution de chacun, le président doit faire en sorte que même les plus timides aient la chance de sortir de leur coquille.

Tout ce qui se dit au cours d’une réunion doit s’adresser à l’ensemble du groupe et non aux voisins immédiats. Un bon moyen de décourager les apartés est de s’interrompre au milieu d’une phrase, donnant ainsi aux coupables la désagréable sensation d’être le seul couple sur la piste. Si l’occasion de leur jouer ce tour ne se présente pas et que leur faire les gros yeux ne suffit pas, le dernier recours est de leur demander de parler pour que tout le monde entende : « Oui, Robert, vous avez quelque chose à dire ? »

L’humour est toujours bienvenu mais, dans une réunion d’affaires, il peut facilement aller trop loin. Si le comique du bureau mène le jeu, on s’amusera peut-être, mais on n’accomplira pas grand-chose. Certes, à faire grise mine aux farceurs, le président risque de passer pour un rabat-joie, mais une attitude juste assez réticente fera comprendre aux gens que ce n’est pas le moment de plaisanter. Au besoin, il pourra dire : « Bon, maintenant, revenons aux choses sérieuses ». Le pire, s’il ne veut pas que la réunion dégénère en une partie de rigolade, serait de sourire et de laisser faire.

Même si sa patience est mise à rude épreuve, le président doit conserver son sang-froid pour que la discussion se poursuive sur un ton convenable. Si le but est d’arriver à une décision conjointe, il doit aussi être scrupuleusement objectif, même si ses vues personnelles sont bien arrêtées.

Lorsque le président occupe dans l’entreprise un rang supérieur à celui des participants, ces derniers peuvent hésiter à faire valoir des opinions qui ne s’accordent pas avec les siennes : Pour contourner cette difficulté, le président devrait exposer son point de vue dès le début : « Voici ce que j’en pense, mais je suis prêt à changer d’avis si vous pouvez me convaincre. »

Le président doit également faire preuve d’objectivité s’il survient des différends entre les participants. Il doit alors trouver le moyen d’intervenir pour résumer impartialement les positions et voir si elles ne présentent pas des points communs. Même si l’unanimité est toujours souhaitable, les divergences ne sauraient être écartées systématiquement, simplement pour conserver l’harmonie. L’objectif est de connaître tous les points de vue, si désagréables qu’ils soient.

Résumer ce qui vient d’être dit pour éviter toute confusion

Les altercations entre participants sont une autre occasion qui permet d’invoquer le règlement. L’usage parlementaire selon lequel les députés s’adressent la parole par l’entremise de l’0rateur a justement pour but de filtrer les propos par trop acerbes. Si une dispute menace de s’envenimer, le président peut rappeler les antagonistes à l’ordre et leur suggérer de s’adresser à lui plutôt que l’un à l’autre. Si la chose semble trop cérémonieuse dans les circonstances, il peut au moins les prier de présenter leurs observations à l’ensemble du groupe.

La plupart des discussions abondent en redites. Le président perçoit généralement le moment précis où l’on commence à s’enliser. Un bon moyen d’empêcher le débat de tourner en rond est de résumer le sens de tout ce verbiage : « Si je comprends bien, vous voulez dire que… ».

De toute manière, c’est une bonne idée de faire le point de temps à autre. Les résumés activent la discussion et permettent d’éliminer les ambiguïtés en incitant les participants à préciser leur pensée si le président a mal interprété leurs paroles. Une des principales fonctions du président est de s’assurer que tous comprennent les questions à l’étude, aussi doit-il écouter attentivement pour saisir la portée exacte de tout ce qui se dit.

C’est aussi la tâche du président de ranimer la conversation lorsqu’elle commence à languir, mais il ne doit pas trop se presser de rompre le silence ; certaines pauses sont nécessaires pour permettre aux gens de réévaluer leur position.

Le succès d’une réunion d’affaires dépend de tous les membres du groupe

Tout le travail fait pendant la réunion peut rester improductif si les décisions ne sont pas mises à exécution. Il faut donc répartir les tâches avant de lever la séance. Pour être certain qu’elles seront accomplies, on fixera des délais pour chacune. Et personne ne devrait quitter la salle de réunion avant d’avoir bien compris ce qu’on attend de lui.

Jusqu’à présent, nous avons considéré principalement le rôle du président, ne serait-ce que parce qu’il peut incomber un jour ou l’autre à la plupart des gestionnaires et des agents de maîtrise. Mais si conscientieux et si brillant qu’il soit, le président n’est pas seul responsable du succès de la réunion, qui dépend également de chacun des membres du groupe.

Nous avons déjà mentionné en passant ce qu’on pouvait attendre des participants : qu’ils arrivent à l’heure et bien préparés, qu’ils suivent la discussion avec attention, qu’ils ne distraient pas les autres, qu’ils s’en tiennent au sujet lorsqu’ils ont la parole et qu’ils évitent la dispute. Ils ne doivent pas anticiper sur l’ordre du jour ou accaparer plus que leur part du temps disponible.

Il y a quelques années, le matériel de communication électronique et l’ordinateur ont fait leur apparition dans les réunions d’affaires, permettant de conférer à distance, de montrer des graphiques et des tableaux plus vivants et d’obtenir des renseignements à quelques moments d’avis. Ces merveilles technologiques avaient pour but d’accroître la productivité, ce qui signifie faire plus de travail en moins de temps.

Les chefs d’entreprise en Occident s’inquiètent toujours, pourtant, de ce que la productivité n’augmente pas aussi rapidement qu’elle le devrait. Dans le monde des affaires, l’offensive en vue d’accroître l’efficience ne semble plus montrer la même vigueur que par le passé.

Depuis l’époque de la Révolution industrielle, la productivité s’est accrue au rythme des progrès techniques. Toutefois, étant donné les prouesses actuelles de l’électronique, on se demande s’il est possible d’aller tellement plus loin dans cette direction. Vraisemblablement, les prochains gains de productivité seront réalisés grâce à une gestion plus efficace des activités purement humaines. La réunion est le point de départ idéal pour toute initiative visant à tirer un meilleur parti du temps consacré à l’élément humain dans les affaires.

Pour que cela soit possible cependant, il faudra surmonter certains blocages psychologiques et le plus tenace de ces blocages est le préjugé voulant que les réunions soient une perte de temps ou, à tout le moins, un mal nécessaire. Naturellement, si l’on se rend à une réunion dans cet état d’esprit, on a toutes les chances de trouver ce qu’on attend. Par contre, si l’on considère la réunion comme un moyen de mettre à profit l’intelligence et l’imagination des gens, on ouvre la voie aux gains de productivité.