Nos presses à imprimer engloutissent chaque jour des tonnes de papier, sur lequel les auteurs les plus divers nous font part de leurs pensées, de leurs sentiments, de leurs expériences et de leurs découvertes. Jamais encore une telle abondance de renseignements n’a été mise à la portée de tous. Au milieu de cette effrayante pullulation d’écrits, le problème capital pour chacun de nous est de savoir lire et utiliser nos lectures.
Il y a plusieurs sortes de lectures. On lit pour apprendre, pour se distraire, pour se réconforter, pour se documenter, pour s’inspirer ou pour se former une règle de vie. Dans les temps anciens, l’humanité pouvait prospérer avec de simples et primitives lueurs de pensée, mais au stade actuel de la civilisation, nous avons besoin d’une doctrine coordonnatrice, qui synthétise et mette à contribution tout l’acquis du passé.
Les connaissances positives accumulées par les quelques centaines de générations qui nous ont précédés sont trop considérables pour qu’on puisse les acquérir par expérience dans le court espace d’une vie humaine. Nous devons recourir au truchement des livres. Les livres reculent les bornes de notre savoir en nous permettant de connaître les faits du passé et de conjecturer les événements de l’avenir.
Songez, par exemple, que nous n’avons que trois moyens d’évaluer l’existence humaine : l’étude du moi, qui est le plus dangereux et le plus difficile, mais souvent le plus fructueux ; l’observation de nos semblables, qui nous cachent parfois leurs secrets les plus révélateurs ; et les livres, qui, malgré toutes leurs erreurs de perspective et de jugement, sont constants, détaillés et toujours à notre disposition.
Il est aussi intéressant qu’utile de lire comment nos ancêtres ont fait face à des crises analogues à la nôtre par leur forme sinon par leur ampleur. Les livres déroulent sous nos yeux le long parchemin de l’histoire afin que les choses éloignées, dans le temps et dans l’espace, nous aident à mieux juger celles qui sont aujourd’hui tout près de nous.
Des amis sûrs et fidèles
On peut se demander si les livres ne sont pas plus précieux encore comme amis que comme sources d’information sur les nations, les peuples et les pays étrangers. Quoi qu’il en soit, la lecture demeure l’un des moyens les plus efficaces de se soustraire aux circonstances fâcheuses et irrémédiables. Le commerce intime des grands auteurs littéraires, philosophiques et artistiques est à la fois un encouragement à la réflexion et un refuge contre la plupart des malheurs de la vie. Goethe ne disait-il pas qu’il ne se connaissait pas de chagrin que n’eût dissipé une demi-heure de lecture ?
Les livres nous rendent également service en contribuant à secouer notre apathie. Le milieu dans lequel nous vivons nous déroute. C’est un enchevêtrement de notions compliquées au milieu desquelles nous sommes portés à nous prélasser avec indifférence. La philosophie grecque, nous le savons, a atteint des sommets auxquels on n’est jamais parvenu par la suite, tandis que la science grecque traînait en arrière. Le danger qui nous menace est exactement l’inverse : les données scientifiques nous inondent chaque jour à tel point que nous suffoquons sous un amas de faits désordonnés ; nos esprits sont accablés de découvertes que nous ne comprenons pas et qui, pour cela, nous font peur.
Ce que nous trouvons dans les livres nous conduira peut-être à réexaminer certaines choses qui nous semblaient tout à fait normales et à nous interroger à leur sujet. La lecture nous incitera à apprécier de nouveau les idées et les idéaux étouffés par le flot des merveilles techniques. Si un livre nous incite à la réflexion, et même s’il provoque notre colère, il est fort probable qu’il nous rend service.
Il convient enfin de citer, parmi les bienfaits des livres, l’utilité de la lecture pour les personnes désireuses d’apprendre à écrire et à s’exprimer. La femme qui veut exceller dans la conversation et l’homme qui tient à ce que ses lettres et ses ordres soient bien compris, doivent savoir choisir leurs lectures.
D’où viennent les citations qui se glissent continuellement dans la conversation, dans les lettres, les discours et la littérature ?
La plupart, et nous les employons souvent sans même nous en rendre compte, sont des expressions tirées de l’Écriture sainte, des fables de La Fontaine, des grandes tragédies de Racine et de Corneille et des comédies de Molière, des contes de Perrault ou de la poésie romantique de Hugo et de Musset.
Les gens de langue anglaise puisent aussi dans la Bible mais, évidemment, citeront par ailleurs Shakespeare, Alice in Wonderland et les opéras de Gilbert et Sullivan.
La lecture qui nous intéresse ici n’est pas celle du critique, mais de l’être humain en quête de valeurs humaines. Si vous avez l’impression qu’un livre vous inspire, vous renseigne, vous aide ou vous délasse, ne vous souciez pas de ce que les autres en disent, il est bon.
Les théoriciens de la littérature sont souvent dans l’erreur. Les pièces de Shakespeare attirèrent des foules énormes et enthousiastes ; les théoriciens de l’époque en conclurent qu’il y avait sûrement en elles quelque chose qui n’allait pas. « Si vous voulez connaître la puissance du génie humain », dit un essayiste, « lisez Shakespeare ; si vous voulez vous convaincre de l’insignifiance du savoir humain, lisez ses commentateurs. »
Les lectures de l’homme d’affaires
L’homme d’affaires qui, malgré ses bonnes résolutions, n’en vient jamais à lire des livres qui ne se rattachent pas directement à sa profession, se prive des habitudes, des perfectionnements, des clartés et du surcroît de liberté d’esprit que lui apporterait un programme de lectures bien équilibré.
Sans doute est-il nécessaire de lire des livres techniques, des publications savantes et des revues spécialisées pour bien exercer son métier, mais il ne faut pas s’arrêter là. L’homme qui doit se plier à la routine de son travail quotidien peut acquérir une forte personnalité par ses lectures. Il peut avoir une double existence : être homme d’affaires parmi les savants et savant parmi les hommes d’affaires.
Un habile artisan, très versé dans les questions propres à son art, se prive des beautés de la vie dont il pourrait jouir s’il ne lit que des livres techniques et des revues et des journaux légers.
La lecture nous fournit les instruments et les matériaux nécessaires pour sortir des conversations banales. Mais elle fait plus encore. Elle augmente nos chances de nous affranchir du train-train de notre profession, de notre métier ou de notre art.
La recherche du savoir
Celui qui lit beaucoup et d’une façon intelligente constate souvent qu’il a le très grand avantage d’en connaître plus long que les autres sur son sujet. Le savoir engendre l’assurance et la confiance en soi.
Certains affectent de mépriser la science livresque, mais on peut se demander si ce n’est pas par envie. Il n’y a pas de plus sûr indice de médiocrité intellectuelle, nous dit l’auteur d’un traité sur l’art d’écrire, que de parler avec dédain de connaissances que l’on ne possède pas soi-même.
Il est vrai que le savoir n’est pas nécessairement un bien en lui-même ; il doit être assimilé par l’intelligence et l’imagination pour être vraiment profitable. Mais il est bon de nous imprégner abondamment de faits et d’idées afin que notre esprit ait de la matière pour travailler.
Les livres nous fournissent les renseignements documentaires qui nous serviront à répondre aux questions capitales. Lorsque nous nous demandons pourquoi les humains se comportent comme ils le font, il ne faut pas chercher la réponse dans notre entourage, mais dans la vaste perspective de l’histoire.
Le lecteur qui choisit bien ses livres devient pour ainsi dire citoyen de tous les pays, contemporain de tous les âges. Il fait la connaissance des personnages les plus divers, profite de l’expérience des autres, élargit ses idées et affine ses goûts. Il aura peut-être la bonne fortune de trouver dans ses livres non seulement le récit des faits tels que l’auteur les a vus, mais aussi la silhouette des événements à venir.
Dans Pères et fils, Tolstoï peint pour la première fois dans la littérature d’imagination le nihiliste, précurseur du communiste ; les dictateurs de tous les temps ont trouvé maints conseils utiles dans le Prince, où Machiavel affirme qu’il est permis à l’homme politique de commettre dans l’intérêt public des actes de violence et de duperie qui seraient condamnables dans la vie privée ; si les non-Allemands s’étaient donné la peine de lire Mein Kampf dès sa parution en 1924, ils y auraient découvert, dans tous ses effroyables détails, le sinistre programme d’Hitler ; il s’écoula un demi-siècle après la mort de Thoreau avant que le Mahatma Gandhi applique en Inde sa doctrine de la désobéissance civile.
Les polémiques déclenchées par des écrits de Jean-Jacques Rousseau, de Malthus et d’Adam Smith ne se sont jamais apaisées. Il y a soixante-dix ans Einstein publiait son article sur l’emploi de l’énergie atomique et donnait au monde l’équation la plus célèbre dans l’histoire : E = mc2. Où l’âge atomique, qui s’ouvrait alors, conduira-t-il l’humanité ? Personne ne le sait.
C’est parce que nous devons nous appliquer à réfléchir d’une manière intelligente aux problèmes de ce genre qu’il est nécessaire de lire avec diligence et discernement.
Le choix des livres
De quelle façon allons-nous choisir nos livres ? Adopterons-nous la formule consacrée, selon laquelle il faut choisir les livres que l’on voudrait avoir avec soi si l’on était jeté dans une île déserte ? Lirons-nous les centaines de livres que des autorités en la matière considèrent comme les meilleurs ?
Le choix des livres à lire est avant tout une affaire personnelle. Quoi que puissent dire les érudits à la louange d’un livre, il n’est pas fait pour vous s’il ne parvient pas à vous intéresser. Et les écrits qui conviendraient aux Robinsons ne sont peut-être pas exactement ceux que l’on lit dans l’autobus, le train ou l’avion, ou au restaurant.
Il est pourtant un principe absolument sûr en matière de lectures : si vous voulez vivifier votre faculté de penser et de réfléchir, si vous désirez être en mesure de discuter judicieusement des questions d’actualité, laissez résolument de côté tout ce qui n’est pas de premier ordre. Perdre son temps à lire des récits pimentés dans un monde où nous avons Dante, Aristote, Descartes, Shakespeare et Pascal, c’est en quelque sorte préférer un morceau de verre brisé aux plus riches diamants. « Irez-vous bavarder avec votre femme de chambre ou votre palefrenier, nous dit Ruskin, lorsque vous pouvez converser avec des reines et des rois ? »
Certains des livres que nous choisirons devront avoir pour objet non pas de nous informer par leurs détails, mais de nous former par la sagesse et les principes qu’ils contiennent. Les principes constituent la propriété littéraire la plus durable, la plus universelle, la plus maniable et la plus pratique.
Les grands auteurs
Les grands auteurs ne sont pas « grands » parce qu’on est convenu de les appeler ainsi, mais parce qu’ils disent des vérités éternelles. Leurs livres nous résument des siècles de pensée humaine ; ils nous lèguent un héritage impérissable, la transcription d’une conversation brillante et distinguée à travers les âges. Un grand auteur ne reflète pas seulement son siècle, mais l’humanité tout entière.
On n’est pas un savant parce qu’on a lu les nombreux livres de tel ou tel grand auteur ; mais celui qui les a lus est plus savant que s’il ne les avait pas lus. Le message de ces auteurs développe son intelligence et accroît sa perspicacité. Leurs principes et leurs solutions sont d’une singulière actualité pour l’homme d’affaires, l’instituteur, la maîtresse de maison ou l’homme politique d’aujourd’hui, qui ont des problèmes à résoudre.
Personne n’apprendra dans les grands auteurs comment faire de meilleures bombes atomiques, mais beaucoup y constateront que les problèmes de la guerre et de la paix sont des problèmes humains et que ces problèmes sont toujours à peu près les mêmes, que les guerres se fassent avec des massues, des épées, de la poudre à canon ou du plutonium. Les problèmes fondamentaux du bien et du mal, de l’amour et de la haine, du bonheur et de la souffrance n’ont pas beaucoup changé au cours des siècles.
On donne à certains chefs-d’oeuvre le nom de « classiques », mot qui s’applique aux livres qui ont le mieux résisté à l’usure. Ces écrits s’adressent à l’esprit des hommes de tous les temps et de toutes les conditions, et leur valeur persiste ou se renouvelle de siècle en siècle.
Il est vrai que l’oeuvre scientifique d’Aristote n’a à peu près rien de commun avec la science que nous connaissons aujourd’hui, mais sa philosophie demeure toujours aussi lumineuse que profonde. Il n’est pas un écrivain qui ne puisse lire sans profit la Poétique d’Aristote. Il faut reconnaître aussi qu’Homère lui-même a quelquefois des inadvertances et que Shakespeare a écrit certains passages de vaine rhétorique, mais l’or l’emporte de beaucoup sur les scories.
Certains lecteurs abandonnent un auteur quand ils découvrent un défaut personnel dans sa vie ou une inexactitude dans ses descriptions. Marc Twain reproche à Fenimore Cooper d’en prendre à son aise avec les détails dans le Tueur de daims. Il y est question, en effet, d’une embarcation de 140 pieds de long qui passe par les sinuosités trois fois plus étroites d’une rivière, alors que six Indiens sont cachés dans un « jeune arbre » pour l’attaquer. La plupart des lecteurs sont tellement occupés par les Indiens qu’ils ne prêtent aucune attention aux dimensions du bateau ni à la grosseur de l’arbre. Et c’est très bien ainsi, car c’est le récit qui compte.
Il ne faut pas non plus que les circonstances particulières à la vie d’un auteur influencent le jugement que nous portons sur son livre. Un grand philosophe a dit : « Ne cherchez pas à savoir si l’auteur d’un livre est bon ou mauvais, pensez seulement au bien qu’il y a dans son livre. » Cela ne veut pas dire qu’il faille lire passivement, mais que c’est l’oeuvre et non pas l’auteur qu’il importe de considérer.
Un programme de lecture
Tout bon livre conduit normalement à un autre livre. Au royaume de la lecture, les sentiers se coupent et se recoupent. Lorsque vous fermez le Bilan de l’histoire de René Grousset ou l’Histoire de la philosophie de Bréhier, après en avoir lu la dernière page, vous êtes comme un étudiant d’université qui vient d’obtenir son diplôme. Il suffit de suivre les flèches indicatrices de ces deux livres, et il y en a beaucoup qui leur ressemblent, pour avoir de quoi lire jusqu’à la fin de ses jours.
On peut aussi commencer par choisir quatre genres de lecture, par exemple : l’histoire, la poésie, la philosophie et les sciences. Prenez un livre qui vous intéresse dans chaque genre, et lisez quand le coeur vous en dit, en passant d’un domaine à l’autre. On raconte que l’écrivain Oliver Wendell Holmes se déridait pendant une demi-heure dans une comédie et qu’après avoir bien ri, il se plongeait dans les Pensées de Marc Aurèle.
Chaque branche de la littérature contribue à sa façon à notre bonheur et à notre plaisir. La poésie dit en paroles ailées ce que nous pensons et ressentons sans pouvoir l’exprimer. La lecture des vers nous permet de mieux maîtriser notre vocabulaire et de formuler nos pensées avec élégance et originalité.
La prose, dont le domaine est beaucoup plus étendu, est la langue naturelle de la communication des idées. Certaines de ses anciennes formes, comme les lettres et les essais, sont des sources d’intérêt et de distraction que nous aurions tort de négliger. Qu’ils soient légers et spirituels ou violents et pamphlétaires, les essais demeurent un excellent moyen de trouver des idées. Quant au genre épistolaire, les Lettres de Mme de Sévigné et la Correspondance de Cicéron n’ont rien perdu avec les siècles de leurs valeur littéraire ou philosophique.
Il convient enfin, dans l’élaboration d’un bon programme de lecture, de ne pas se laisser prendre par les titres flamboyants et les réclames intéressées des éditeurs. Les sentiments qu’éveillent en nous les romans noirs et les récits grossiers ne sont pas faits pour accroître notre culture et assurer notre tranquillité d’esprit.
Commencer et persévérer
Il y a sans doute des gens qui se croient sincèrement trop importants, trop absorbés par leurs affaires, pour passer leur temps à lire. Mais la lecture est peut-être la chose la plus profitable qu’ils puissent faire dans la vie. De leurs lectures peut dépendre le succès futur de leurs entreprises. En tout cas, c’est sur elles que repose leur bien-être intellectuel.
Il n’est pas nécessaire de rester assis pendant deux ou trois heures pour lire effectivement. Des hommes ont lu en entier de gros volumes rien qu’en attendant que le dîner soit prêt.
Le lecteur moyen peut lire un livre ordinaire à la vitesse de 300 mots à la minute. Cela représente 4,500 mots en un quart d’heure et 1,642,500 mots en une année. En prenant seulement quinze minutes par jour, on peut lire vingt livres de longueur moyenne entre le 1er janvier et le 31 décembre.
Malgré ses multiples occupations, sir William Osler voulut consacrer tous les soirs un quart d’heure à la lecture avant de s’endormir. Jamais durant toute sa vie, il ne manqua à cette règle. Et quel fruit en retira-t-il ? Cette excellente habitude lui permit d’acquérir un nouveau savoir qui servit de contrepoids à sa spécialité. Les spécialistes de la littérature anglaise le reconnaissent comme une autorité sur sir Thomas Browne, grand prosateur du XVIIe siècle.
Il n’est pas d’occupation que l’on puisse commencer, interrompre et reprendre aussi facilement que la lecture. Les dames de la cour des Tudors portaient de minuscules livres ornés de bijoux ; les dames d’aujourd’hui glissent un livre de petit format dans leur sac, tandis que les hommes en mettent dans leurs poches ou leurs serviettes. Ils les ont ainsi à portée de la main chaque fois qu’il faut attendre, – attendre les repas, les autobus, les trains, leur tour chez le coiffeur, un appel téléphonique, un rendez-vous, le commencement d’un spectacle, ou simplement la tournure des événements.
Parmi les livres les plus faciles à emporter se rangent les livres de poche, dans lesquels on trouve les meilleurs écrits de tous les temps. Ce qui importe réellement dans les livres, c’est le contenu et non pas la reliure. Mais si vous n’aimez ni l’apparence ni le toucher d’une couverture en papier, il existe des couvre-livres en similicuir, qui transforment un livre de un dollar en un volume d’aspect somptueux.
Pour lire avec fruit
Toutes les belles et bonnes pensées ont été écrites des milliers de fois, mais, pour les faire vraiment nôtres, il importe d’y réfléchir en les lisant. Il faut se demander comment les opinions ou les idées exprimées par l’auteur s’accordent avec nos opinions et nos idées. Même une affirmation qui semble choquer notre bon sens mérite parfois qu’on s’y arrête. Il se peut même qu’elle ait plus de valeur que beaucoup d’autres notions que nous admettons.
L’un des grands avantages d’avoir des livres à soi est que l’on peut, en les parcourant, marquer ou souligner certains passages. Cela nous permet, non seulement d’écouter notre ami l’auteur, mais aussi de converser avec lui en notant nos réflexions dans les marges ou au bas des pages.
Il faut aussi se poser des questions en lisant. Ce sont les questions, non les réponses, qui vivifient l’esprit. Nos questions feront surgir tout un cortège d’idées ; elles mettront notre jugement et notre raisonnement en branle ; elles donneront encore plus d’intérêt à nos lectures.
Une tâche sans fin
On n’a jamais fini de lire. Ce que nous savons est toujours infiniment moindre que tout ce qui nous reste à apprendre. Nous accumulons sans cesse des idées et des renseignements, sans jamais parvenir à combler notre désir d’en savoir davantage.
Edison affirmait, vers la fin de sa fructueuse carrière, qu’il ne pouvait rien conclure. « Je n’en suis encore qu’à l’étude des phénomènes », disait-il. Confucius consacra inlassablement toute sa vie à la recherche de l’instruction et du savoir. Socrate fut considéré comme un sage, non pas à cause de l’étendue de sa science, mais parce qu’il avouait ne rien savoir encore à soixante-dix ans.
La lecture n’est ni un exercice ni une pénitence, mais une chose qui nous offre l’assurance d’une vie plus agréable et plus féconde. Aucun diplôme n’est requis pour entrer dans la noble corporation des lecteurs. Il suffit de se mettre à l’oeuvre, de se réserver le temps nécessaire et de butiner de livre en livre.