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La communauté locale est le cadre où se réalise la vie de l’individu. Nous sommes à la naissance des non-valeurs et nous ne devenons des personnes que lorsque nous nous intégrons dans un groupe, que nous assumons un rôle dans la vie et que nous prenons conscience de notre place parmi nos coassociés.

La véritable communauté sociale est celle qui offre un milieu dans lequel les hommes qui la composent disposent des moyens et de l’encouragement nécessaires pour atteindre leur plein épanouissement et qui sait faire contribuer au mieux-être collectif les possibilités d’épanouissement qu’on y trouve.

La définition de la société que nous a laissée saint Augustin est à la fois brève et complète : un groupe, petit ou grand, de personnes unies par leur accord quant aux choses qu’elles aiment. Un tel groupement établit des normes à atteindre, choisit des chefs pour mettre ses activités en valeur, met des plans en discussion, pratique la collaboration, la coopération et la participation.

L’avantage de faire partie d’une communauté paroissiale ou municipale, c’est de ne plus vivre isolé. Dès ses premières années, l’être humain aspire à appartenir à une collectivité, à être entouré et accepté, à adhérer à un groupe. Même s’il existait un homme assez égoïste pour ne rechercher que son propre bien, il devrait admettre que les intérêts de sa communauté sont aussi ses intérêts à lui.

David Thoreau lui-même, que l’on cite parfois comme un grand solitaire, ne pouvait se passer des autres. Un voisin lui prêta une hache pour abattre les arbres destinés à bâtir la maison qu’il construisit sur le terrain d’un autre homme ; quelqu’un lui passa des outils pour assembler les pièces de bois ; d’autres l’aidèrent à élever la charpente ; quelqu’un d’autre lui donna des grains de maïs pour ses premières semailles ; et il allait de temps en temps « dîner en ville » avec ses voisins.

Qu’est-ce qu’une communauté locale ?

C’est en somme une société où la vie idéale rêvée par tous ceux qui en font partie est favorisée dans toute la mesure du possible. C’est une manière de vivre et non pas seulement un ensemble de maisons, de magasins et de rues. Ses habitants éprouvent des sentiments de sécurité, de fierté, de dignité et d’espoir. On y trouve des courants d’intérêts variés : spirituels, culturels, politiques, commerciaux, industriels, éducatifs et sociaux. Peut-être y a-t-il chez elle un certain nombre de problèmes à résoudre : maisons de piètre apparence, mauvais éclairage des rues, écoles et hôpitaux encombrés, normes hygiéniques médiocres ; mais la collectivité bien organisée s’efforce d’y remédier grâce au réaménagement, à la conservation, à l’expansion industrielle, à l’élévation du niveau de vie, à la bonne entente sociale, à une conception de plus en plus vaste de ce qui pourrait être. Elle transporte sur le plan de l’action les besoins et les aspirations de sa population.

Que faut-il pour édifier une communauté de ce genre ? Ses habitants doivent avoir le désir et la volonté de travailler ensemble à la solution de leurs problèmes communs ; ils doivent tirer parti des ressources potentielles qui existent dans la collectivité ; ils doivent apprendre ensemble à utiliser ces ressources à leur plus grand avantage.

L’esprit communautaire n’est pas une chose qui nous vient par hasard. C’est une collaboration réfléchie entre personnes de mêmes dispositions qui sont résolues à mener une vie sociale heureuse.

S’il est un fait bien établi dans le monde, c’est que l’homme est un animal sociable ayant besoin, pour vivre et assurer son bien-être, de se mêler à d’autres êtres de son espèce. Ce besoin trouve sa satisfaction, à des degrés divers, dans la famille, dans la maison de rapport et même dans la rue. À leur manière, les enfants qui ignorent qui est champion du monde au jeu de billes, mais qui se passionnent pour savoir qui est le meilleur joueur du quartier font preuve d’esprit communautaire.

Il y a un véritable enrichissement personnel à trouver dans les activités de la collectivité qui, comme les réunions locales, tendent à régler des problèmes ou diffuser des renseignements, dans les sports et les cercles d’artisanat qui offrent l’occasion aux talents de s’exprimer, dans les programmes d’études qui développent l’intelligence et élargissent les horizons, dans les manifestations spéciales visant à aider les gens à mieux connaître leurs voisins.

Le sens du progrès

Une collectivité florissante ne reste pas stationnaire. Les changements qui s’opèrent dans les conditions de milieu, dans les aspirations et au sein de la population entraînent la modification des plans, et éventuellement des objectifs. « L’un des enseignements de l’histoire, écrit Frank Underhill dans Les valeurs en conflit, est que chaque génération d’hommes passe nécessairement par une période de transition douloureuse, critique et destructive. » L’art de la vie en société consiste à conserver un code de base et à avoir le courage de le remettre en question pour satisfaire les exigences de la raison éclairée.

Les gens qui sont complètement absorbés par le souci de maintenir un état de choses qu’ils estiment nécessaires à leur existence ne contribuent pas de façon valable à la vie de leur collectivité. Ils sont, comme les poules, trop occupés à observer l’ordre de « picorement » existant où chaque oiseau becquète ceux qui sont au-dessous de lui et est becqueté par ceux qui sont au-dessus de lui.

Le rang social est une piètre façon de juger de la valeur des citoyens, et personne ne devrait s’affliger des appréciations superficielles auxquelles il donne lieu. Souvenons-nous du conseil d’Epictète : « Quelqu’un passe-t-il avant vous dans une réception ou dans la vie intime ? S’il est juste qu’il ait ce privilège il faut vous en réjouir ; si cela est injuste, ne regrettez pas de ne pas l’avoir. »

Le fait d’appartenir à une classe ou de fréquenter tel ou tel milieu n’est ni une distinction très originale ni une preuve de raffinement. Il est permis à un homme de rehausser sa réputation grâce à la splendeur de sa maison, mais c’est le maître qui doit faire honneur à sa magnifique demeure et non pas celle-ci qui doit faire honneur à son maître. En principe, c’est par ses oeuvres, son sens des responsabilités et sa valeur personnelle que la communauté juge un homme.

Les problèmes communautaires

Certains problèmes peuvent venir déranger la bonne marche de la collectivité. Beaucoup de ces problèmes ne se sont pas encore fait sentir au Canada, car nos citoyens se rendent compte que la population canadienne est issue de plusieurs pays différents et que l’avenir du Canada comme lieu où il fait bon vivre dépend de leur volonté à tous de travailler ensemble.

Les citoyens qui tireront le meilleur parti de la vie sociale seront ceux qui sauront respecter la personnalité humaine sans préjugés de race, de couleur, de classe, de foi ou d’origine nationale. La même aspiration profonde s’exprime dans les chansons populaires et patriotiques de la trentaine de groupes ethniques que l’on retrouve dans la population du Canada : celle de la paix et du mieux-vivre. Si les paroles et la musique sont parfois différentes, l’ardent désir de l’épanouissement personnel et de rapports enrichissants avec les voisins filtre dans tous ces chants. Chacun d’eux contribue à sa façon à la joie et à la culture communes.

Pourquoi chaque collectivité n’aurait-elle pas des drapeaux de tous les pays d’origine de ses habitants qu’elle hisserait à la mairie à l’occasion des anniversaires ? Cela servirait à reconnaître la diversité de l’apport fourni par l’ensemble des citoyens, tous Canadiens certes, mais avec des antécédents différents.

La réglementation sociale

Il ne suffit pas que les membres de la collectivité se montrent consciencieux dans l’accomplissement de ce qui est bien : il doit exister des règles clairement définies et bien observées. L’exhortation « aime ton prochain comme toi-même » est si générale, et peut sembler tellement vague, qu’elle exige d’être complétée, dans la vie pratique quotidienne, par des règles de conduite plus précises. Si certaines lois n’étaient pas formulées et appliquées, la société retournerait bientôt à la sauvagerie et à l’anarchie.

Le principe et la base de la collectivité sont le fait que chacun de ses membres renonce librement à sa liberté à certains égards en échange des avantages qu’il attend de son association avec ses concitoyens. Il s’unit avec ses voisins pour désigner des juges, des agents de police, etc., comme pour dire : « si je deviens difficile, je vous prie de me mettre à ma place. »

Les lois sont nécessaires pour permettre aux hommes de vivre et de travailler dans une harmonie satisfaisante et profiter des bienfaits de l’action coopérative. Les citoyens ont des droits, mais tout droit comporte une obligation. C’est vrai non seulement au sens incontesté que lorsqu’un homme a un droit les autres ont le devoir de le respecter, mais aussi au sens plus subtil que l’homme qui possède un droit est tenu de l’utiliser pour le bien commun de la société. Se dérober à cette responsabilité sociale est une abdication aussi grave que celle de renoncer à sa responsabilité personnelle.

Les institutions de la collectivité

L’orientation sociale est assurée par divers organismes, dont la mission n’est pas de réglementer la société en général. Ces organismes contribuent à façonner les idées sur les questions sociales et à mouler la vie des gens selon les modèles communément approuvés. Tels sont les familles, les églises, les loges, les clubs, etc. Ces institutions offrent à l’individu des habitudes de vie, des modes de comportement admis sur lesquels on le jugera, ainsi que des objectifs et des ambitions qu’il pourra s’efforcer de réaliser.

Une institution attire ordinairement des membres parce que ses buts avoués ont un sens pour eux. Elle ne peut fonctionner efficacement que dans la mesure où elle offre une possibilité de participation à chacun de ses membres de même que l’occasion pour eux de ressentir certains effets bienfaisants de l’action personnelle qu’ils exercent par leur participation.

L’institution familiale a subi de profonds changements au cours des dernières années du fait qu’un nombre de plus en plus grand de ses fonctions ont été prises en charge par des groupements extérieurs au foyer et que la diversité de plus en plus grande de leurs intérêts achemine les parents et les enfants vers des voies différentes. Pourtant la cellule familiale offre encore l’occasion de partager une foule d’expériences très variées et d’acquérir le discernement des valeurs et la sagacité dont les enfants ont besoin à mesure que s’étendent et se diversifient leurs contacts avec la collectivité.

Nos institutions religieuses sont des forces d’une puissance considérable pour encourager la bonne volonté dans notre monde troublé. Toutes les grandes religions enseignent la dignité de l’âme humaine et fixent des idéaux qui influencent profondément les gens et les aident à pratiquer les vertus fondamentales. Les croyances qu’elles prêchent et l’importance qu’elles attachent à la confiance, l’espoir et l’amour sont de précieux atouts pour le développement du civisme.

Outre la loi et les institutions, nous avons les convenances et les coutumes pour harmoniser nos rapports. La bonne marche d’une collectivité est liée à l’existence de certains types de comportement réciproque entre les individus et les groupes. Le canadianisme bien compris suppose la pratique des civilités élémentaires, ces bons procédés sociaux qui rendent le cours de la vie plus agréable, ces gentillesses qui nous permettent de manifester notre respect, notre déférence, notre reconnaissance et notre bienveillance. Les convenances sont des usages traditionnels généralement admis concernant le bien, le mal, les devoirs, les privilèges et les tabous, et transmis au sein de la société en tant que moyens de vivre commodément avec nos semblables.

La participation

L’une des plus belles choses de la vie consiste à aimer les gens et à vouloir participer activement avec eux à la grande aventure humaine. En priant avec les autres ; en éprouvant de la compassion pour autrui ; en nous réunissant pour écouter de la musique ; en nous joignant à nos voisins pour approfondir certaines questions, pour donner suite à des idées, pour aider les faibles, pour honorer les magnanimes, pour contribuer à l’édification d’un monde meilleur, nous nous comportons d’une façon digne de notre condition d’êtres humains.

Un bon moyen de mettre en commun l’expérience et les idées des citoyens est de les réunir pour examiner les possibilités et étudier les plans d’action. Ceux qui coopèrent et font des propositions se sentiront dans l’obligation de veiller à ce que l’on prenne les mesures voulues. Mais le programme mis en avant doit avoir un but bien défini et bien compris. Seuls les gens qui ont le sentiment d’être engagés renonceront à leurs émissions de télévision pour assister à une réunion.

Pour avoir du succès, une réunion destinée à promouvoir les intérêts de la collectivité doit être conduite de telle sorte que tous les participants y seront traités avec justice et courtoisie. Il faut que ses membres se montrent disposés à tenir compte du point de vue des minorités tout en respectant les décisions de la majorité. Discuter une question ce n’est pas seulement en parler. Cela veut dire l’examiner en détail, la débattre, l’approfondir. Le fait d’agiter une idée dans une discussion en groupe aide à la formuler clairement et permet ainsi aux membres de décider avec une certaine assurance s’il s’agit d’une opération valable pour la collectivité, s’il est possible d’y donner suite pour le moment, si les citoyens peuvent s’en charger ou s’il convient de la déférer à une autorité quelconque et quel en est le degré d’urgence.

Toute entreprise exige un chef, et chaque membre de la communauté est intéressé en pratique et de la façon la plus concrète par cette nécessité. Les idées au sujet de la fonction de chef se sont quelque peu embrouillées parce que trop de gens s’empressent de prêter foi aux symboles extérieurs plutôt que de rechercher des preuves concluantes de compétence. On voit dans les grands airs, la force de la voix et autres apparats oratoires le témoignage que celui qui en est doué possède aussi les qualités vraiment fondamentales. Le chef compétent hausse la discussion en groupe à un niveau supérieur à la moyenne. Son véritable rôle consiste à amener les gens à donner le meilleur de leurs idées et de leur énergie, et à unir leurs efforts pour atteindre un but commun.

La collaboration

Pour accomplir quelque chose de valable, les hommes doivent travailler ensemble et avoir des principes et des objectifs semblables. C’est Marc-Aurèle, le roi philosophe, qui nous dit : « Nous sommes faits pour collaborer, comme les pieds, comme les mains, comme les paupières. » La vraie collaboration est l’harmonie grâce à laquelle toutes les parties, si différentes puissent-elles nous sembler, concourent au bien-être général du tout.

L’étude et l’élaboration des plans mènent à l’action. La vocation de l’homme est de vivre avec toute l’ardeur dont il est capable.

L’action revêt les formes les plus diverses. Elle peut favoriser et aider les mouvements qui visent à accroître la culture ; elle peut encourager le véritable esprit démocratique et la tolérance ; elle peut donner à la jeunesse l’espoir et la confiance dans la vie que la désorganisation actuelle du monde a fortement ébranlés ; elle peut faire renaître le sens de l’appartenance chez une humanité qui vit à l’âge de la spécialisation et de l’isolement qui en résulte.

Au coeur de la petite collectivité se trouvent les nombreux organismes bénévoles qui se consacrent au service des autres. Leurs membres s’inspirent de la maxime qui dit que la vie est une longue participation. Ils croient, comme le Dr William Mayo, que tout homme doué d’une force physique extraordinaire, d’une capacité intellectuelle remarquable ou d’un talent particulier a une dette envers la société. Il est tenu de mettre à la disposition de ses semblables les fruits de son savoir, les résultats de ses recherches, bref sa compétence et son art.

Dans une grande société, beaucoup ont à souffrir sans que ce soit précisément de leur faute, et c’est un devoir, non pas un acte de charité, pour les plus fortunés de faire tout ce qu’ils peuvent pour aider les autres. Il y a du vrai dans la maxime « Noblesse oblige ». Nul citoyen digne de ce nom ne veut qu’on lui applique la question accusatrice du prophète Jérémie : « Cela ne vous fait-il rien, ô vous tous qui passez par le chemin ? »

Le bon citoyen

Faire partie d’une société suppose un certain engagement. Nous ne pouvons jamais nous soustraire à notre rôle de membre de l’espèce humaine, pas même en prétextant l’impuissance ; pas non plus en disant que tout ce que nous pourrons faire ne changera rien ; ni en alléguant que nos obligations morales sont limitées parce que nous ne représentons après tout que le point culminant dans l’évolution d’une espèce de singes à qui il arriva par hasard de descendre des arbres ; ni enfin en broyant du noir dans notre coin comme le fait Achille dans l’Iliade d’Homère en se retirant dans sa tente et en y demeurant jusqu’à ce que la bataille soit presque perdue et que son ami soit tué.

Si les risques sont grands d’avoir à mettre la main à la pâte pour le bien de la collectivité, les récompenses sont à l’avenant, car c’est un fait fondamental dans la vie humaine qu’il faut se donner pour atteindre sa plénitude.

Le bon citoyen apprendra à connaître ses voisins et à participer avec eux à la vie de la communauté ; tout en aidant et soutenant l’institution religieuse de son choix, il accordera aux personnes d’une autre croyance la même considération que celle qu’il souhaite de leur part ; il se respectera lui-même et se comportera de façon à mériter le respect des autres ; il se familiarisera avec les problèmes importants qui se posent à ses représentants auprès des pouvoirs municipaux, provinciaux et fédéraux, et il se servira de ses connaissances au moment de voter ; il fera en sorte que sa maison fasse honneur à son quartier.

Le savoir, l’intérêt et l’action des citoyens sont l’âme même de notre société démocratique. Un citoyen bien renseigné ne se laisse pas induire à appuyer des causes de pacotille ; il sait se garder de la crédulité et de la myopie de l’opinion populacière, qui sont le commencement de la passion, de la panique, du fanatisme, de l’illusion et de la violence.

Ceux qui détiennent l’autorité dans la collectivité et dans ses institutions ont le devoir de tenir le citoyen informé de leurs plans et de leurs buts. Il serait peut-être possible d’adapter l’idée de l’ombudsman à la petite collectivité en créant un service central chargé d’indiquer aux gens où s’adresser pour obtenir de l’aide lorsqu’ils ont des problèmes à résoudre, des crises à surmonter, ou quelque chose à entreprendre en vue d’améliorer la collectivité.

Les écoles pourraient devenir des centres de stimulation intellectuelle. L’enseignement des adultes devrait être l’une des premières préoccupations de chaque localité. Les études postscolaires développent le pouvoir de réflexion et la capacité d’action rationnelle des citoyens. Elles leur confèrent une notion réaliste de ce qu’est la manière de vivre canadienne et l’art de la pratiquer de façon à en tirer le plus grand avantage.

Beaucoup de collectivités considèrent le conseil des citoyens qu’elles ont établi comme un moyen efficace pour permettre à leurs habitants de participer à l’orientation de la vie collective ; pour favoriser la collaboration parmi les organismes et les institutions ; pour mobiliser, au besoin, toutes les forces de la collectivité pour affronter et résoudre les problèmes ; pour intéresser et former les citoyens, et les préparer à assumer leur rôle de chefs ; pour leur offrir l’occasion d’exprimer leurs idées en faveur des changements positifs à adopter.

La collectivité idéale

La collectivité idéale est plus que l’ensemble de ses membres. Elle peut concevoir des idées auxquelles les citoyens agissant individuellement n’auraient jamais pensé. Les membres de la collectivité idéale établissent entre eux des liens de solidarité. Ils réunissent les multiples filaments de leurs intérêts en un faisceau de rapports qui tendent à réaliser pour chacun la vie optimale.

Voici quelques-uns des critères qui permettent de juger si une collectivité s’acquitte de sa fonction envers les individus dont elle se compose. Si l’un de ces critères est absent, ce sera une occasion pour le bon citoyen de créer un mouvement en vue d’améliorer les choses. L’organisation de la société qui remplit sa mission doit offrir : des possibilités d’épanouissement personnel ; la certitude d’un environnement sûr, à l’abri de l’inquiétude et des menaces ; l’occasion pour le citoyen d’étendre le champ de son expérience grâce à un effort de coopération destiné à instaurer une vie meilleure ; l’assurance d’être respecté et aimé par ses voisins.

Il ne fait aucun doute que la société moderne s’achemine vers la désintégration. Elle est assaillie d’une part par toutes sortes de propagandes idéologiques alors que d’autre part, elle est peu sûre d’elle-même, indécise dans ses buts et incertaine de la façon de s’y prendre pour remédier à la situation.

Comme nous l’ont dit les atomiciens, le monde sera un ou il ne sera pas. Il devra être un monde pacifique où les hommes s’entraideront ou il finira par ne plus être un milieu de vie convenable.

La communauté mondiale est la somme de toutes les petites sociétés qui en font partie, et elle ne peut exister que si nous conservons les valeurs que représentent les rapports de bon voisinage.

Ces valeurs comprennent notamment l’affection qui ne peut naître que de l’intimité de ceux qui travaillent ensemble à une bonne cause, l’appréciation de la personnalité, la suprématie de la probité et le sens de la solidarité.