La tâche de contenir le flot envahissant de la paperasse s’impose tôt ou tard à la direction des petites comme des grandes entreprises.
Il n’y a pas longtemps encore les travaux d’écriture étaient considérés tout au plus comme un mal nécessaire. On dépensait libéralement pour acheter de l’outillage, pour faire de la publicité et pour se procurer des camions, mais le bureau demeurait chose négligeable. Et pourtant le bureau est le pivot d’où rayonnent toutes les opérations de production et de distribution.
Les commis ne sont pas assis à leur bureau pour consigner, inscrire, vérifier, pointer et exécuter aveuglément les ordres. Leur mission est de réaliser le chemin le plus court et le plus simple entre les données d’origine et le but à atteindre.
La bonne administration, voilà ce qui est essentiel dans le domaine des écritures et de la paperasse, et, en cette matière, il y a toujours péril en la demeure. Ce qu’il faut à l’administrateur, c’est un bloc d’étiquettes rouges comme celles dont Churchill se servait pendant la guerre et qui portaient la mention : « Donner suite aujourd’hui même. »
Autrefois, la solution universelle des problèmes d’écritures était d’accroître le personnel. Mais cette mode a disparu avec la cherté des locaux à usage de bureaux, la rareté de la main-d’oeuvre et la hausse des salaires. Le remède consiste maintenant à améliorer les méthodes, à moderniser le matériel et à contrôler le rendement.
La première chose que doit faire le chef de bureau est de se poser des questions sur les pratiques établies. Il lui sera peut-être difficile de mesurer le travail d’écritures, mais il faut le faire si l’on veut rendre le travail de bureau vraiment efficace. Ce serait s’interdire tout espoir d’amélioration que de se rallier à propos d’une opération quelconque à l’affirmation que « cela s’est toujours fait ainsi ».
La productivité exige que le chef de bureau soit capable de rendre compte du temps des secrétaires, des dactylos, des archivistes et de tous les autres employés qui manipulent des documents. Quelle est la tâche de chacun ? Est-ce nécessaire ? Est-elle bien faite ?
Que s’est-il passé ?
Le déluge de la paperasse a été provoqué par l’expansion rapide de notre économie, le nombre croissant des formules exigées par les gouvernements, l’avènement de l’instruction universelle qui non seulement rend les gens capables d’écrire, mais leur en donne aussi le désir, ainsi que par la tendance à considérer l’abondance de la paperasse comme un signe d’importance. Le fait de se promener avec une liasse de documents à la main est, dans beaucoup de bureaux, un symbole de prestige, tout comme la verge noire du Gentilhomme huissier lorsqu’il passe par les couloirs du Parlement pour convoquer les Communes à la Chambre rouge.
À l’échelon de la direction commerciale, le flot de la paperasse n’est plus seulement un embarras, mais semble être devenu un enfer où le directeur est condamné à passer le reste de ses jours. Ordinairement plongé jusqu’à la ceinture dans les papiers de toutes sortes, il songe avec effroi qu’il en aurait jusqu’au cou s’il lui fallait s’absenter pendant quelques jours.
Au Canada, le recensement de 1961 indiquait que 13 p. 100 de la population active occupent des emplois de bureau. Dans son manuel sur la Composition et la réglementation des formules, la Commission de la fonction publique signalait, en 1955, que « dans l’industrie, la proportion des employés de bureau par rapport aux ouvriers d’usine et d’atelier était de 1 à 30 en 1900, de 1 à 10 en 1935 et de 1 à 2 ½ en 1950 ». Et la Commission Glassco déclare dans son rapport : « Si l’on ajoute… les frais d’administration et les avantages sociaux, le coût du travail de bureau du gouvernement canadien dépasse 400 millions de dollars par an. »
Il est impossible de se passer des écritures, car elles sont essentielles pour assurer la bonne marche des entreprises. Si les documents sont bien faits, ils servent de guide à la direction. Ce qui importe, c’est de veiller à ce que les renseignements qu’ils contiennent soient nécessaires, exacts et concis.
Quoi faire
En réalité, les formules, les dossiers et les papiers représentent la seule oeuvre du bureau. Les ennuis commencent lorsque les employés de bureau s’empressent de conclure que la multiplication des écritures est un indice de bon rendement. Il ne faut pas croire qu’il n’y a que dans les services du gouvernement que l’on trouve des bureaucrates dont l’unique ambition est de faire germer deux feuilles de papier là où il n’en poussait qu’une auparavant.
Il existe une tendance croissante et sans doute justifiable à faire remplir des formules pour toutes sortes de choses. Une enquête a révélé qu’environ un tiers des dossiers conservés par les entreprises ordinaires pourraient être jetés sans nuire le moindrement à leur fonctionnement. Ces documents inutiles coûtent cher en papier, en locaux de classement, en matériel et en personnel.
Lorsqu’il s’agit de mettre un frein à l’accumulation ou d’établir une nouvelle formule, posez-vous les questions suivantes : « Peut-on s’en passer ? Est-il possible de combiner cela ? Y a-t-il moyen de le simplifier ? »
Après avoir mis de l’ordre dans les papiers, jetez un coup d’oeil sur la méthode employée pour l’achat et la diffusion des formules. Si on ne les surveille pas de très près, les employés de bureau sont portés à commander de nouvelles formules même quand les anciennes feraient tout aussi bien l’affaire. Ne faites pas réimprimer une formule sans vérifier si elle n’est pas périmée ou si son emploi n’a pas changé. Demandez-vous aussi s’il ne conviendrait pas d’en améliorer la disposition afin d’en faciliter l’usage. Une nouvelle méthode de reproduction la rendrait peut-être plus commode tout en permettant d’en réduire le coût.
La réglementation des formules exige la centralisation. Il importe qu’une personne ayant le sens des responsabilités et l’autorité nécessaire ait la mission précise de veiller à ce que des formules soient établies lorsqu’il y a lieu et qu’elles soient distribuées et utilisées de façon à tirer le plus grand parti possible des salaires payés aux commis. Cela suppose à la fois élimination, simplification et unification. Cette tâche obligera à étudier les procédés et les méthodes de travail.
Un bon programme de réglementation des formules peut faire épargner en quelques mois suffisamment d’argent pour en assurer l’application pendant un an. Une société, par exemple, a constaté qu’elle pouvait supprimer 15 p. 100 de ses formules et réaliser ainsi un bénéfice net grâce à une économie de papier, de frais d’impression et de personnel.
La conception des formules
Un commis sans expérience ne saurait certes concevoir des formules commerciales de nature à tirer le maximum d’utilité du matériel et des méthodes de bureau modernes. Les formules faites par des amateurs entraînent chaque jour le gaspillage de nombreuses heures de travail. Les erreurs de conception et la médiocrité de la disposition exigent plus de travail à chaque étape de l’emploi de la formule, tandis que les formules bien étudiées et bien agencées peuvent permettre d’abaisser de 10 à 15 p. 100 les frais d’exploitation d’un bureau.
Ce qu’il convient de mettre sur la formule dépend naturellement de la nature particulière de votre entreprise et ne se trouve pas dans les livres. Mais il existe des principes de base qu’il y a intérêt à observer dans la rédaction des formules. Une formule doit demander des renseignements bien précis, et ni plus ni moins qu’il n’en faut. Il importe que ces renseignements soient faciles à inscrire et à utiliser. L’impression doit être aussi bon marché que possible compte tenu de l’usage auquel la formule est destinée. Le texte doit être simple, afin d’éviter les erreurs.
La formule doit autant que possible s’expliquer d’elle-même. Les instructions séparées risquent toujours de s’égarer. Des titres et des rubriques, exprimés en termes clairs et simples, suffiront à éclairer l’utilisateur. Le caractère doit se lire facilement. Les espacements bizarres et les textes de lecture difficile gênent la bonne exécution du travail. L’équilibre des divers éléments, la netteté de la composition, la répartition du texte et des blancs, tout doit concourir à guider le regard au lieu de l’irriter.
Il ne faut pas perdre de vue que le coût du papier et les frais d’impression ne représentent qu’une faible fraction du coût total des formules, lequel comprend aussi le temps employé à la rédaction des formules. le transport des renseignements dans les livres ou sur d’autres formules et le classement. Il a été calculé que chaque dollar consacré aux formules entraîne une dépense de dix à vingt dollars en travail de bureau. La Commission Glassco affirme même, sur la foi d’une estimation, que les frais du travail qu’implique l’usage des formules sont de dix à cinquante fois plus élevés que les frais d’impression.
Les notes de service
La note de service fait gagner beaucoup de temps. Elle permet à celui qui en est l’auteur d’ordonner ses idées de façon à exprimer ce qu’il veut dire avec le plus de concision possible et au destinataire de l’étudier à tête reposée et d’y réfléchir.
Mais les notes sont avant tout des moyens d’action. Aussi celles qui portent la mention « Pour information » sont-elles à proscrire. Évitez d’en envoyer des exemplaires aux personnes que la note n’intéresse pas directement.
La manie de faire circuler toutes sortes de papiers est très commune dans les affaires. Chacun s’efforce de tenir tout le monde au courant de son travail et de ses progrès. Et avec les méthodes de reproduction modernes, il est aussi facile de tirer cinquante exemplaires qu’une dizaine. D’où les nombreuses feuilles de papier à initialer qui s’accumulent chaque matin dans la boîte à courrier. S’il fallait lire tout ce qu’on reçoit, il ne resterait plus de temps pour travailler.
On pourrait économiser à la fois du temps et de l’argent si chacun demandait aux autres ce qu’ils tiennent à voir exactement et si ceux qui reçoivent des documents dont ils n’ont pas besoin les renvoyaient en demandant de rayer leur nom de la liste des destinataires.
Pour ce qui est de la rédaction même des notes de service, voici une petite formule pour les rendre dynamiques, pratiques et concises : veillez à ce que chacun des points de votre texte soit exposé avec logique ; traitez des questions et des faits requis, sans rien de plus. Écrivez clairement.
Le courrier
L’origine de la poste remonte à l’an 3800 environ av. J.-C., époque où Sargon, roi de Babylone, commença à faire transporter ses dépêches par une équipe de courriers. Le départ de ces messagers vers les diverses parties de son empire était annoncé par des trompettes d’or.
Aujourd’hui, le courrier suscite plus souvent des murmures que le son majestueux des trompettes. Les rédacteurs de lettres cherchent, semble-t-il, à réaliser dans leur travail l’idéal fixé par l’historien grec Hérodote aux porteurs de messages de son temps : « Rien, dit-il, ni la neige, ni la pluie, ni la chaleur, ni les ténèbres ne les empêchent de franchir l’étape qui leur est assignée. »
On estime qu’il arrive chaque année plus de 100 millions de pièces de courrier dans les ministères de l’État et que 200 millions de pièces y sont expédiées. Le transport et la manipulation de tout ce courrier, auquel s’ajoutent les millions et les millions de lettres des entreprises commerciales, représentent une tâche gigantesque. Le premier timbre-poste des provinces du Canada fut émis en 1851, et aujourd’hui, soit 114 ans plus tard, le Guide officiel du service postal canadien renferme 466 pages de directives, de tarifs et de conseils se rapportant au courrier. L’index à lui seul compte 22 pages, où il est question de tout, depuis « les abeilles » jusqu’aux « zones de livraison gratuite des journaux. »
Les méthodes de bureau
Tout le travail de bureau se fait en succession, c’est pourquoi il convient de placer les pupitres de façon à faciliter le déroulement ordonné des opérations et de veiller à ce que les documents se déplacent autant que possible en ligne droite.
C’est la précision de la pensée et de l’action qui doit dominer dans la manipulation de chaque feuille de papier sur chaque bureau. On voit parfois des employées incompétentes travailler avec inattention et nonchalance, et passer une demi-heure ou une heure sans rien accomplir. Une bonne employée ne prend pas deux fois un document entre ses mains lorsqu’une fois suffit. En le prenant, elle se pose instinctivement cette question : « Maintenant que j’ai ce papier, où dois-je le mettre pour que la prochaine opération soit exécutée par la personne qu’il faut sans actions inutiles ? » Elle ne plie rien, mais laisse tout à plat devant elle jusqu’à ce qu’elle ait fait le nécessaire.
Les petits bureaux sont exposés à subir des pertes de temps du fait que leur personnel doit passer trop souvent d’un travail à un autre. De précieuses minutes de travail se trouvent ainsi gaspillées à ranger les papiers, les dossiers, les livres et le matériel et à sortir ce qu’il faut pour entreprendre une nouvelle tâche. Ce qui importe dans un petit bureau ce n’est pas tant la compétence professionnelle que la souplesse et la variété des talents, mais il appartient au directeur d’organiser le travail de manière que les employés changent de tâche le moins souvent possible.
Les machines de bureau
Les fabricants de matériel et de fournitures de bureau ont accompli des progrès vraiment remarquables dans la mise au point des appareils nécessaires pour parer à ce que l’on a appelé l’explosion de la paperasse. À la vérité, le travail de bureau a atteint un niveau si élevé qu’il a maintenant absolument besoin de l’aide de la machine pour ne pas suffoquer.
Il y a un siècle, presque tous les renseignements étaient inscrits par des commis au moyen du matériel de bureau le plus rudimentaire. La direction devait donc se contenter d’éléments d’information beaucoup moins considérables et qui seraient aujourd’hui tout à fait insuffisants pour répondre aux besoins accrus du commerce et de l’industrie. Le matériel de bureau démodé coûte plus cher par année en temps et en énergie perdus, ainsi qu’en renseignements incomplets, que la dépense que représente l’acquisition d’installations modernes.
La grande erreur dans l’administration des bureaux consiste à acheter sans discernement. Il importe de choisir les machines judicieusement, compte tenu toujours des besoins et du travail du bureau. Si elles sont achetées avec soin, les machines permettront de réduire les dépenses, de supprimer beaucoup de corvées monotones, de donner un meilleur effet au rendement, d’améliorer la qualité et la précision, et de faciliter le travail en cas d’affluence ou d’embouteillage.
La paperasse et les banques
Si les banques se trouvent dans l’obligation de recourir aux appareils électroniques et autres pour ne pas succomber sous l’avalanche des chèques, c’est qu’elles favorisent fortement l’emploi de ce moyen de paiement si pratique dans le commerce comme dans la vie courante.
Selon la Federal Reserve Bank des États-Unis, 9 dollars sur 10 sont payés par chèque parmi la population américaine. Il existe dans cet établissement environ soixante millions de comptes sur lesquels de cinquante à soixante millions de chèques sont tirés tous les jours ouvrables de l’année. On prévoit qu’en 1970, la Federal Reserve Bank recevra près de vingt mille millions de chèques par an. Et chaque chèque passe par les mains de quatorze employés.
La situation est proportionnellement la même au Canada, mais il n’y a pas de statistiques générales comme celles de la Federal Reserve Bank. Les deux principales succursales de la Banque Royale, celle de Montréal et celle de Toronto, voient défiler dans leurs bureaux environ un quart de million de chèques les jours les plus chargés, ce qui nécessite quelque 750,000 inscriptions.
Tout cela serait impossible avec le système manuel. Aussi les banques adoptent-elles de plus en plus le traitement électronique des données, qui permet l’enregistrement, sous forme numérique, de 10,000 symboles d’information sur un pouce carré de ruban magnétique et leur interprétation au rythme de 100,000 signes par seconde.
Bien analyser son problème
La plupart des livres que l’on a écrits pour venir en aide au chef de bureau qui s’efforce d’endiguer le flot de la paperasse commencent par donner le conseil suivant : « Étudiez à fond votre bureau. »
Le rendement d’un bureau se mesure, du moins en apparence, à la quantité de papier qu’il consomme et non pas aux dimensions, au poids et au prix de son matériel. Mais on ne trébuche pas facilement sur le papier, et l’on finit par si bien s’habituer à sa présence qu’on ne la remarque plus.
Examinez les papiers qui cheminent lentement de pupitre en pupitre. Sont-ils tous nécessaires ? Il est si facile de demander de nouvelles statistiques, d’établir une nouvelle formule, de faire des copies supplémentaires uniquement « pour le cas où ». En matière de données, la demande ne connaît pas de bornes : assurez-vous toujours qu’il s’agit de données nécessaires et non pas simplement d’un étalage de chiffres que personne ne lira sauf les dactylos.
Après avoir analysé le travail de votre bureau, lisez les directives de la Commission Glassco sur la gestion des documents administratifs : les formules doivent être réglementées afin d’en maintenir le nombre dans de justes limites ; les rapports doivent faire l’objet d’une surveillance continuelle afin d’éliminer ceux qui ne sont plus nécessaires ; la rédaction, la dictée, la transcription et l’expédition de la correspondance exigent que l’on établisse des normes et que l’on adopte les méthodes et le matériel requis pour assurer un bon rendement ; les dossiers doivent être rangés dans des classeurs ou enregistrés sur film, avec le souci constant d’éviter le double emploi, et disposés de façon qu’il soit facile de les sortir pour les consulter ; il faut élaborer des méthodes qui permettraient d’assurer systématiquement et en temps voulu le transfert des dossiers dans des dépôts centraux où l’espace serait beaucoup meilleur marché, ou encore leur envoi aux archives ou leur retransformation en pâte à papier.
Beaucoup de dirigeants s’obstinent à ne pas vouloir se débarrasser des documents inutiles. L’usage de recueillir et d’accumuler des renseignements est plus répandu qu’on l’admet chez les chefs de bureau. Des millions de feuilles de papier, qui ne sont d’aucune utilité sont retirées des dossiers et placées dans des cartonniers ou dans des boîtes que l’on empile dans des locaux qui pourraient avantageusement servir à autre chose. Un enquêteur a découvert qu’une entreprise de 250 employés conservait 561,000 documents périmés, qui ne faisaient qu’encombrer ses classeurs.
Mais si vous ne pouvez pas vous corriger de l’habitude de tout classer, il vous reste encore une planche de salut : c’est la nouvelle et merveilleuse méthode de la reproduction sur microfilm, qui permet de réunir des volumes importants de documents dans des rouleaux de pellicule.
Pour atténuer le mal
L’une des tâches les plus urgentes est d’examiner les menus travaux. Ils engendrent souvent des automatismes qui peuvent nous écraser si nous ne sommes pas sur nos gardes. Si la paperasse paralyse l’action de vos facultés créatrices, appelez au secours ou trouvez un meilleur moyen d’accomplir et de diriger votre travail. Si vous avez la manie d’écrire des notes « pour information » ou si vous en êtes la victime, mettez-y un terme sans tarder.
On conseille, par exemple, de joindre tous les six mois aux rapports courants une petite note-question portant sur la valeur et l’utilité du document. Il s’agit ensuite de rayer de la liste ceux qui ne répondent pas dans un délai raisonnable. Et n’oublions pas non plus de faire enlever aussi notre nom sur la liste des choses que nous ne voulons pas recevoir.
Celui qui reste attaché à ta paperasse perd son initiative. Au lieu de chercher à découvrir et à connaître par lui-même, il en vient à ne plus s’occuper que des choses que l’on signale à son attention. C’est ce que l’on pourrait appeler l’enlisement dans la vie bureaucratique.
Le remède proposé par un humoriste pour conjurer ce danger a au moins le mérite de faire ressortir toute l’absurdité d’une situation de plus en plus inquiétante. Il s’agirait, d’après lui, d’élever des termites ou de ces vers qui rongent les livres et de les lâcher dans les classeurs et les cartonniers où se trouvent des documents, vieux de plus de cinq ans. Ces bestioles, en effet, adorent le papier. À notre époque d’accélération, le temps n’est peut-être pas loin où, faute de pouvoir inventer un meilleur moyen pour secouer le joug de la paperasse, chaque homme d’affaires, chaque homme public et chaque bureaucrate voudra avoir son petit troupeau de termites, auxquels il donnera sa prose en pâture.