Le printemps n’est pas seulement la saison des rêves d’amour et du réveil de la nature, il ramène aussi le calcul et le paiement de l’impôt sur le revenu.
On a dit, surtout pendant la guerre, que ce qui déplaît aux Canadiens n’est pas tant le paiement de l’impôt que le fait d’avoir à le payer et à remplir des formules. Il semble naturel de détester les déclarations d’impôt. Le contribuable mécontent trouve mauvais que le gouvernement mette le nez dans ses affaires et, naturellement, n’aime pas les changements que le paiement des impôts occasionne dans sa manière de vivre.
La Loi de l’impôt de guerre sur le revenu du Canada a grossi de quelques paragraphes à 84 pages contenant 48,000 mots et il existe une multitude de brochures et d’opuscules pour l’expliquer. Un « guide » à l’usage des contribuables contient 131,000 mots, et un autre, destiné à un usage plus populaire, en a 80,000. La masse d’explications relatives aux impôts sur le revenu rappelle l’avis de l’inventeur écossais d’une table des logarithmes. John Napier écrivait en 1614 : « Vu qu’il n’y a rien, chers mathématiciens, qui soit plus ennuyeux en mathématiques ni plus importun ou plus gênant pour les calculateurs, que les multiplications, les divisions, les racines carrées et les racines cubiques des nombres de plusieurs chiffres, qui à part le temps pénible qu’elles prennent nous exposent à maintes erreurs sournoises, j’ai commencé par conséquent à me demander par quelle méthode sûre et facile je pourrais supprimer ces difficultés ». Les contribuables d’aujourd’hui seraient reconnaissants à Napier s’il s’était occupé de simplifier les déclarations d’impôt sur le revenu et d’éliminer les nombreuses chances « d’erreurs sournoises ». En même temps, on devrait abolir la phraséologie fiscale et passer une loi obligeant les auteurs d’instructions à l’usage du public à employer des mots simples, des phrases courtes et pas de parenthèses.
Il est généralement admis que l’impôt sur le revenu est une forme raisonnable de taxation. II est capable de s’adapter étroitement aux circonstances individuelles et frappe aussi les gens d’une manière plus forte que les autres impôts. Il s’adapte automatiquement aux fluctuations économiques, surtout depuis que le Canada paie ses dépenses au fur et à mesure.
Avant la guerre il y avait au Canada environ 300,000 personnes qui remplissaient des déclarations d’impôt sur le revenu ; il y en a 2 millions ½ aujourd’hui. En même temps que les déclarations devenaient plus nombreuses elles sont devenues de plus en plus compliquées chaque année, de sorte que les contribuables ainsi que les employés du fisc ont été accablés de travail. Le gouvernement ferait bien, a-t-on dit, de supprimer les déclarations dans le cas des revenus inférieurs à $2,000 par an et de laisser aux employeurs le soin de déduire l’impôt et de faire un relevé d’ensemble, tandis que le ministère du Revenu national s’occuperait des gens qui apportent le gros des impôts de manière à expédier la besogne. Mais d’un autre côté, on prétend que lorsque chaque personne assujettie à l’impôt est obligée de déclarer ses revenus et calculer son propre impôt, elle se fait une idée plus exacte de la responsabilité qui lui incombe dans l’économie nationale. Esope, dans sa fable des impôts sur les animaux, avait probablement une meilleure idée. Le tigre proposa d’imposer les défauts et de donner à chacun la tâche de juger ceux des autres. « Non, » dit l’éléphant, « mettons plutôt un impôt sur les vertus et que chaque animal compte les siennes. Ce sera là un bon moyen de remplir facilement l’échiquier. » Les Américains demandent de temps à autre que le gouvernement publie les déclarations d’impôt et au cours d’une campagne à cet effet quelqu’un avança cet ingénieux argument « notre amour-propre et la vanité de nos femmes et de nos familles nous feraient payer le plus gros impôt sur le revenu dont nous poumons nous charger. » Les formules de déclaration offrent cette chance à tous les citoyens. Ceux qui n’arrivent pas à satisfaire l’inspecteur de l’impôt sur le revenu au premier essai trouveront les employés empressés à les aider.
Adopté, comme en Grande-Bretagne, à titre d’impôt de guerre, l’impôt sur le revenu fait maintenant partie intégrante de notre système fiscal. Après de nombreux hauts et bas depuis 1917, il a subi ses plus gros changements en 1941, une des graves années de la guerre. Le ministre des Finances dit à la Chambre des Communes : « Nous en sommes venus à la conclusion que le Dominion devra hausser les taux de l’impôt sur le revenu des particuliers et des sociétés au niveau le plus élevé qui soit raisonnable en ce moment si les provinces n’exploitent pas déjà ces sources d’impôts… J’annoncerai certaines propositions d’après lesquelles le taux minimum de l’impôt sur le revenu des sociétés sera porté à 40 p. 100, le taux sur celui des particuliers sera considérablement accru et l’impôt de défense nationale subira une majoration. Toutefois, comme ces majorations, jointes aux taux déjà existants des impôts provinciaux, constitueraient un trop lourd fardeau, nous nous proposons de demander aux provinces, à titre de mesure applicable uniquement pendant la durée de la guerre, de renoncer à exploiter ces deux sources d’impôt. Le plan …. mettra le Dominion en état de percevoir les impôts nécessaires sans porter préjudice aux habitants des différentes parties du pays ni aux divers paliers de contribuables. » Les provinces acceptèrent de renoncer à l’impôt sur le revenu pendant la durée de la guerre et un an après la fin des hostilités.
Une brochure résumant les modifications apportées à l’impôt sur le revenu pendant la guerre fut préparée sous le titre « Personal Income Tax » à l’intention de la Conférence fédérale-provinciale du rétablissement en août dernier à Ottawa. On y lit : « Les particuliers ont été taxés au plus haut niveau en 1943. Quoique les taux aient établi le record en 1942, le taux réel n’a pas été le plus fort cette année-là par suite de la remise de la moitié de l’impôt. Depuis 1943, toutes les modifications importantes ont généralement visé à diminuer le montant des impôts au moyen de plus grosses allocations et déductions et par la suppression des « épargnes » ou portion « remboursable » ; les taux n’ont pas changé depuis 1942 (sauf en ce qui concerne la portion « remboursable ») et les particuliers paient au même taux (« épargnes » non comprises) depuis cette époque. » En décembre 1945, le gouvernement a réduit l’impôt sur le revenu de 16 pour cent et autorisé une déduction de 4 pour cent sur les impôts de l’année.
Les impôts sont le principal moyen par lequel l’État se procure des fonds et représentent une cession forcée de la richesse des particuliers à la société. Cette cession contient le danger de décourager la production industrielle parce qu’elle laisse moins de fonds à l’industrie pour consacrer à son expansion et moins d’argent aux particuliers pour placer dans des entreprises productives. Les gouvernements doivent tenir compte de tout cela en décidant le montant de leurs dépenses, le montant de leurs emprunts et le montant de leurs impôts. Les impôts sont en quelque sorte gouvernés par les dépenses de l’État. Quelques-unes sont forcées, comme en cas de guerre pour la défense du pays. D’autres sont volontaires, comme celles pour la sécurité sociale et les travaux publics. Depuis quelques années le public semble s’en remettre de plus en plus à l’échiquier national pour la satisfaction de ses besoins, et l’État s’efforce d’y tenir tête par des impôts.
Le ministre des Finances a parlé en décembre des dépenses que l’État était forcé de faire et expliqué combien il lui était difficile d’essayer d’économiser : « Nous parlons de mettre un frein aux dépenses, mais comment la Chambre nous aide-t-elle à y parvenir ? Neuf sur dix des discours de la Chambre nous demandent de dépenser davantage et dans de nouvelles directions… Si le Gouvernement dépense beaucoup, ce n’est pas parce que les ministres le désirent ; c’est à la demande du public et des députés. C’est là ce qui cause les dépenses. Je me sens parfois en lutte contre le monde entier quand j’essaie de combattre ces demandes de dépenses. »
En conséquence, nous avons l’impôt sur le revenu, et apparemment il restera tant que le public et ses représentants au Parlement demanderont de dépenser de l’argent. L’impôt sur le revenu des particuliers et des sociétés est une source très souple de revenus. Au moyen d’adaptations minutieuses d’une année à l’autre, disent ses partisans, il est capable de produire les revenus nécessaires à l’État. D’un autre côté, ses détracteurs déclarent que c’est une fausse économie de taxer davantage les particuliers et les sociétés pendant les années maigres où l’État a besoin d’argent, en cas de crise par exemple. En levant de plus lourds impôts, l’État s’empare de capitaux qui auraient pu servir à donner du travail à un plus grand nombre d’ouvriers et ces impôts peuvent avoir des conséquences très sérieuses. L’ancien impôt sur les fenêtres en Angleterre réduisit tellement l’usage des fenêtres que les gens étaient privés d’air et de lumière ; les lois sur les céréales apportèrent une certaine mesure de bien-être aux cultivateurs, mais appauvrirent le régime des ouvriers industriels.
Aux yeux du grand public, les finances publiques sont entourées d’une auréole magique. La plupart des organismes d’État paraissent souscrire à la résolution de Mark Twain, « de vivre selon ses moyens même s’il était obligé d’emprunter pour y arriver. »
Quant à la méthode d’encaisser les impôts, l’État a le choix en général entre les contributions directes et les contributions indirectes. La contribution directe est celle imposée aux personnes qui doivent la payer ; d’aucuns diront peut-être que le consommateur est libre de payer ou non les contributions indirectes, car il n’est pas obligé d’acheter les marchandises ainsi taxées. Il peut cesser de fumer s’il ne veut pas payer 43 cents de plus pour une demi-livre de tabac et 14 pour son papier à cigarettes qu’on lui donnait pour rien. C’est pour cela que les impôts de consommation ne sont pas toujours productifs. La guerre a démontré que les pays qui comptaient sur les contributions indirectes ont été désappointés. Celles-ci ont contribué à restreindre la consommation, ce qui est désirable en temps de guerre, mais elles n’ont pas grossi les revenus publics. Un autre argument contre les impôts indirects, et par suite en faveur des contributions directes comme l’impôt sur le revenu, est que tous les impôts indirects pèsent le plus lourdement sur les petits salariés. Ils sont de plus invisibles, de sorte que les gens ne se rendent pas compte des droits qu’ils payent et ne se sentent pas responsables, par conséquent, des dépenses de leurs gouvernements. On parle beaucoup plus de l’impôt sur le revenu qui a rapporté 1,037 millions de dollars en 1944 que de toutes les autres taxes qui en ont rapporté 1,400 millions, ce qu’il faut sans doute attribuer au fait qu’on voit et qu’on sent chaque dollar de l’impôt sur le revenu. Pour inculquer une vigilance salutaire aux citoyens, disent les adversaires des impôts indirects, il faut que le public puisse calculer sans difficulté combien il paye et pourquoi.
L’incidence de l’impôt est l’un des complexes et des importants sujets de l’économie politique. Sans bonne analyse de l’incidence d’un impôt, il est impossible de se faire une idée juste de son effet réel. Il y a certes des injustices sous tous les régimes fiscaux, mais si le système en général est bien conçu, il ne pèsera pas rajustement en général sur un particulier ou sur une classe. Il importe de décider d’abord en quoi consistent la justice et l’égalité. Les uns pensent que les impôts devraient être en rapport des avantages, mais comment mesurer les avantages qu’un particulier retire de l’État. D’autres voudraient les calculer par rapport aux moyens, mais ceux-ci, comme le niveau de vie, sont souples et variables ; c’est un terme vague gouverné par toutes sortes de facteurs imprévus.
Les gens critiquent la complexité des déclarations d’impôt sur le revenu, mais aucun plan ne saurait être simple et juste à la fois. Si l’on veut bien tenir compte de l’effet d’un impôt sur chaque particulier ainsi que de ses moyens et de ses besoins, il faut un système très complexe d’enquête et d’évaluation. Si tout le monde devait payer un impôt de $50, indépendamment des circonstances, les enquêtes et les formules seraient inutiles, mais un tel impôt serait manifestement injuste. La norme administrative d’égalité signifie égalité proportionnelle de sacrifice, de façon que la contribution de chaque citoyen aux dépenses de l’État ne gêne pas les uns plus que les autres. Les ministres des Finances ont admis à maintes reprises qu’il est impossible d’arriver entièrement à cette perfection, mais c’est toujours le but des gouvernements sincères, et s’il est difficile d’être parfaitement juste ce n’est pas une raison pour ne pas essayer de l’être.
Étant donné qu’un minimum de revenus est nécessaire à l’existence, les lois fiscales décrètent un certain montant exempt d’impôt. Il est probablement impossible d’établir un montant précis, et le chiffre varie selon les pays et les époques. Les frais de perception militent également, sans n’avoir rien à voir avec le principe, en faveur de l’exemption des petits salaires. L’impôt de 94 pour cent sur les revenus dépassant $100,660 ne coûte pas plus cher à percevoir que les 2 pour cent qui pourraient être prélevés sur les revenus de moins de $660. En d’autres termes, il n’est ni plus difficile ni plus coûteux de percevoir $235,000 que $13.20.
Beaucoup de gens considèrent l’impôt sur les excédents de bénéfices, l’impôt sur les compagnies et les droits de succession comme faisant partie de « l’impôt sur le revenu ». La Loi sur les droits successoraux est entrée en vigueur en 1941. Elle exemptait les successions de $5,000 ainsi que certaines sommes supérieures à ce montant, variant, comme les taux, selon le degré de parenté du bénéficiaire. Vu que l’incidence des droits sur la transmission des biens d’une personne au décès est analogue à celle des impôts fonciers ad valorem en général, on a soutenu qu’ils ne devraient porter que sur les immobilisations et non sur les frais courants ordinaires. D’autres, naturellement, considèrent les taxes sur les successions comme un instrument pour dissiper les fortunes à la mort du fondateur. Ils allèguent, à cet appui, que cette taxe ne pèse en réalité sur personne, car le défunt a joui de ses biens jusqu’à sa mort et ses héritiers n’en ont jamais eu possession. D’autres enfin prétendent que si les gouvernements continuent à considérer les successions comme une vache à lait, les gens auront moins intérêt à amasser des richesses, et que la vie économique du pays en souffrira.
Il semble bien évident que des impôts trop élevés peuvent nuire aux affaires, mais il y a depuis quelques années une tendance marquée à imposer le droit de faire des affaires, surtout pour les compagnies. La présente complexité des impôts sur les compagnies, disait la Commission royale en 1940, « est impossible à décrire. » Elle faisait remarquer qu’il existe, en fait d’impôts, l’impôt sur le revenu des corporations commerciales, que perçoivent le Dominion et la plupart des gouvernements provinciaux ; les impôts perçus par un ou plusieurs gouvernements sur le capital-actions, le nombre de succursales, le revenu brut, le chiffre de la production, la durée de l’exploitation, l’étendue des voies ferrées ou des fils, le parcours en exploitation, la circulation des billets de banque, les primes d’assurance, les placements et les dépôts, etc., selon le commerce du contribuable. « Ces impôts se sont multipliés d’une façon tout à fait illogique et désordonnée, ajoute le rapport de la Commission, et vont à l’encontre de toutes les données d’une saine fiscalité. » Les impôts sur les compagnies sont basés sur le revenu ou sur le capital. Tant que le même régime s’applique à des corporations du même genre, il y a peut-être un semblant d’égalité, mais quand une compagnie se trouve dans une province différente et paie des impôts différents, la base de la concurrence s’en trouve désorganisée et l’une des deux compagnies en souffre.
La Loi de 1940 sur la taxation des surplus de bénéfices a pour objet d’imposer les surplus de bénéfices commerciaux qui résultent de l’expansion de l’économie de guerre. Le chiffre adopté comme moyenne est celui des trois meilleures années de 1936 à 1939. Cette taxe est en réalité une sorte d’impôt spécial sur le revenu, très rémunérateur pour le gouvernement.
Nombre de gens au Canada aiment à comparer ce qu’ils payent en impôt sur le revenu par rapport aux autres pays. Le tableau suivant, basé sur les données d’un ouvrage sur l’impôt sur le revenu des particuliers, préparé à titre de référence pour la Conférence fédérale-provinciale du rétablissement, leur en donnera une idée. Il faudrait plusieurs pages de chiffres pour calculer, en tenant compte du coût variable de la vie, les nombreuses taxes municipales, exemptions et surtaxes qui modifient le montant dans chaque cas. Toutefois, le tableau donne un aperçu général des impôts payés par différents paliers de contribuables dans 4 pays.
L’impôt est de 6.7 pour cent au Canada sur un revenu de $1,500, par comparaison avec 19.1 en Australie, 10.7 au Royaume-Uni, et 6.3 pour cent aux États-Unis, tandis que pour les revenus de $50,000 les taux sont de 67.5, 85.6, 70.0 et 60.6 pour cent respectivement.
Du moment que les impôts trop lourds découragent l’entreprise, l’initiative et l’effort, il convient d’adapter soigneusement l’impôt sur le revenu à la vie nationale. Cela est aussi nécessaire du point de vue de la caisse de l’État que de celui des affaires, car lorsqu’un impôt ou un tarif absorbe tous les bénéfices, il cesse par sa nature même de rapporter des revenus. L’industrie est une chose vivante et croissante, et elle ne peut se contenter indéfiniment de bénéfices arbitrairement fixés si elle doit satisfaire les besoins matériels du public et les besoins pécuniaires de l’État. Il lui faut constamment de nouveaux capitaux, et la taxation à outrance des particuliers ou des compagnies finira par tuer la poule aux oeufs d’or. Cela semble manifeste, mais les législateurs et les factions sont souvent myopes en ce qui concerne les conséquences finales des lois. Nonobstant toute opinion idéaliste, le fondement de l’entreprise productive repose sur l’énergie, l’habileté, l’économie et l’expansion, et il faut veiller à ne pas paralyser ces vertus par des impôts intempestifs.
Après avoir établi les principes à suivre dans la taxation des revenus, la cotisation des diverses sortes d’employés et l’égalité de répartition en matière d’impôts, le travail de l’administration ne fait que commencer. Les règlements édictés par les législateurs exigent une grande mesure d’interprétation pour s’adapter à tous les problèmes des percepteurs. On s’est plaint dernièrement des lenteurs des évaluations et des décisions ainsi que de la grande latitude accordée aux employés du fisc. En ce qui concerne le premier grief, toutes les déclarations d’impôt sont censées être vérifiées et établies par le ministère dans l’année qui suit leur envoi, mais tout le monde sait que le nombre croissant des déclarations en temps de guerre a retardé le ministère de plusieurs années. Le dernier « feuillet rose » (jugement définitif sur les déclarations d’impôt sur le revenu) reçu par certains contribuables de la catégorie T-1 se rapporte à 1941. Cet étrange état de choses, soutient-on, handicape les affaires, et certains milieux demandent la réorganisation et la mise au point de la Division de l’impôt sur le revenu ainsi que de tout le régime fiscal.
En ce qui concerne les pouvoirs discrétionnaires, les contribuables et les employés du fisc ont un champ d’action bien défini. Une récente décision de la Cour Suprême a vivement critiqué les pouvoirs discrétionnaires du ministère du Revenu national, mais la faute n’en est pas tant à ceux qui appliquent la loi qu’à la loi elle-même. C’est un amas de règlements, de modifications et de décisions qui ont besoin d’être complètement révisés et codifiés.
L’avenir dépend en grande partie du bon sens de la fiscalité. Conscient de ce fait, le gouvernement a promis de réduire encore l’impôt sur le revenu dès que les provinces auront accepté les propositions du gouvernement fédéral, et d’atténuer le caractère de double taxation dans l’impôt sur le revenu des compagnies. Les impôts sont peut-être le nerf de l’État, comme dit Cicéron, mais il y a des limites, tous les gouvernements l’ont constaté, à la quantité de médicament qui donne des muscles à l’État. Les rois doivent tondre et non pas écorcher leurs moutons, et l’impôt doit être basé non seulement sur les ressources des citoyens mais aussi sur leur capacité de régénération.
Pour que l’impôt sur le revenu soit compatible avec la justice et le bon sens, il ne doit ni ajouter aux difficultés des petits salariés ni restreindre les entreprises des gens à gros revenus. Les gouvernements doivent être en mesure de réfuter les critiques contre les impôts par les résultats atteints pour le bien de toute la société. Sinon, cet épisode de l’histoire grecque pourra leur servir de leçon : Lorsque Thémistocle alla à Andros en quête d’argent, il avertit les habitants qu’il avait amené avec lui deux déesses : la Persuasion et la Force. Ceux-ci lui répondirent qu’ils avaient eux aussi deux grandes déesses qui leur interdisaient de lui donner de l’argent et qui s’appelaient la Pauvreté et l’Impossibilité.