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Qu’est-ce qu’un touriste ? Que gagne-t-il à être un touriste ? Qu’en retire le pays qu’il visite ou le sien ? Dans quelle mesure le Canada devrait-il encourager l’industrie touristique ?

Le présent Bulletin répondra à ces questions ; disons pour l’instant qu’un touriste est celui qui voyage dans un autre but que pour ses affaires ou pour aller s’établir quelque part ; qu’il y gagne du repos, des amis et du plaisir ; qu’il contribue des connaissances et qu’il dépense de l’argent ; qu’il apprend à aimer et comprendre les gens qu’il rencontre, et que nulle part au monde l’industrie touristique n’est aussi importante qu’au Canada.

La guerre, il est vrai, a rapetissé la terre en accélérant la vitesse des voyages, mais elle nous a permis de parcourir de plus grandes distances. Pendant des millénaires l’homme a voyagé à pied, puis à dos d’animal. Et tout d’un coup, au cours du dernier siècle, sa soif de déplacement a été satisfaite par l’invention de trains, automobiles, navires à vapeur et avions.

Le temps n’est plus, heureusement, où les gens allaient à l’étranger simplement pour chanter les louanges de leur pays. Quelques rares voyageurs traversent encore des sites historiques ou des villes fameuses, sans se soucier des hauts faits qui s’y sont déroulés, mais en général les touristes ont l’oeil et l’esprit ouverts. Les gens d’aujourd’hui n’ont plus le point de vue étroit de leurs ancêtres aux habitudes casanières. Leurs voyages ont une grande portée sociale, qu’ils aient pour objectif les grandes villes ou la vie au grand air.

Depuis le début du siècle jusqu’à la dernière guerre, le mouvement touristique fit des progrès phénoménaux dans tous les pays, mais c’était essentiellement un mouvement des classes privilégiées, réservé à ceux qui avaient des loisirs et des moyens. Entre les deux guerres, le tourisme devint général. Les gens voyageaient en autobus, autos, trains, par eau et par air, ils traversaient les frontières internationales à pied et à bicyclette. La tension nerveuse de la dernière guerre s’était relâchée, et des peuples entiers s’échappaient de leur milieu domestique et national.

Le Canada a beaucoup à offrir aux touristes. De l’est à l’ouest et du nord au sud, il déroule un contraste infini aux yeux des voyageurs par train, par bateau, par route et par air. La guerre, par suite du manque d’essence et de matériel roulant ainsi que des changements forcés dans nos habitudes, a produit son effet sur les voyages à l’intérieur et à l’extérieur du pays. Les gens sont trop occupés pour beaucoup voyager ; les hôtels sont pleins et les trains sont bondés de voyageurs ainsi que de soldats et de matériaux de guerre ; mais à la fin de la guerre un grand va-et-vient amical se produira entre les provinces et à travers la frontière internationale.

Privés du plaisir de voyager à l’étranger par le contrôle du change et le rationnement de l’essence, nombre de Canadiens ont exploré les beautés de leur propre pays. Ils ont trouvé dans les provinces voisines des endroits charmants pour passer leurs vacances. C’est une bonne chose pour le pays, car l’habitude des voyages dans le Dominion aidera à soulager les régions en détresse, permettra aux gens de s’initier aux problèmes et aux circonstances de leurs voisins, créera des liens d’amitié et donnera un point de vue national à ceux qui n’avaient peut-être que des idées étroites.

La plupart des gens considèrent toutefois le tourisme comme quelque chose d’international, quoique ce ne soit que depuis la crise économique des années après 1930 que les gouvernements lui aient accordé une sérieuse attention comme facteur dans le commerce international. Tandis que les visiteurs nous apportent de précieuses devises étrangères, nos citoyens ont l’occasion de servir les intérêts nationaux en stimulant les exportations et en faisant de la réclame pour le Canada. Les voyages donnent lieu à des affaires et haussent le niveau d’existence dans les régions isolées et peu avancées. Dès que l’état de guerre le permettra, on devrait abaisser les barrières pour encourager le libre échange de visiteurs.

Les statistiques de quelques années importantes révèlent l’importance des visiteurs étrangers pour le Canada. En 1938, le solde créditeur des paiements internationaux du Canada se chiffrait à $184,800,000, dont 78.5 pour cent en commerce touristique. Cette année-là, sans le tourisme, le solde créditeur des paiements internationaux du Canada aurait été insignifiant. Pendant plusieurs années, les recettes touristiques ont à peu près compensé la balance défavorable de nos échanges avec les États-Unis.

On a dit que le Canada peut rendre le tourisme sa plus grande source de revenus et de richesses naturelles après l’agriculture et les mines. Autre important aspect, en parcourant le Canada, les étrangers apprennent à connaître le pays et ses produits, ce qui sert à créer un marché pour nos exportations, et aucun pays au monde n’a autant que nous à gagner sous ce rapport.

Le commerce touristique n’est qu’une partie des marchandises et des services qui forment le volume total du commerce entre les nations. Beaucoup de gens ont autant de difficulté à se rendre compte de cela qu’ils en ont à comprendre que les exportations des grains des prairies ont un effet sur les revenus des pêcheurs de la Nouvelle-Écosse, ou que le succès de notre service commercial en ouvrant des débouchés à l’étranger pour les produits des usines du Québec se fait sentir sur le bien-être des familles de la côte du Pacifique. Tout le monde n’a pas de contacts directs avec le commerce touristique. Chacun sait que les hôtels, les chemins de fer, les lignes aériennes, les restaurants et les marchands de bibelots touchent leur part de l’argent des touristes, mais cet argent que les touristes dépensent pour services et marchandises s’infiltre dans toute l’économie nationale. Une enquête de l’Association des hôtels américains révèle que le dollar du touriste est réparti ainsi : magasins de détail, 31 cents ; hôtels, 23 cents ; restaurants, 18 cents ; garages, 10 cents ; divers, 10 cents ; théâtres, 8 cents. Puis l’enquête poursuit la répartition des recettes. La part de tout l’argent des touristes obtenue par l’hôtelier est répartie ainsi par lui pour les services suivants : feuille de paye, 31 cents ; divers, fournitures, etc., 29 cents ; marchandises, vivres, breuvages, etc., 19 cents ; dépréciation, 9 cents ; assurances, impôts, etc., 6 cents, « ce qui ne lui laisse pas assez pour payer 5 pour cent sur la moitié de son capital engagé. » On voit donc que ceux qui reçoivent tout l’argent des visiteurs n’en conservent pas beaucoup.

Le commerce touristique comprend tout depuis les épingles jusqu’aux locomotives, et embrasse toutes les branches du commerce, agriculteurs, banquiers, entrepreneurs, et tous ceux qui sont dans les affaires. Il répartit l’argent et les emplois, non seulement dans les grandes villes, mais dans les petits villages et les régions rurales. On a estimé qu’en 1929 les touristes ont consommé plus de 4 millions de livres de beurre, 18 millions de livres de viande, 4 millions de douzaines d’oeufs et d’autres denrées dans la même proportion. Il est donc évident que la prospérité de l’agriculture, du commerce, des transports et de tout le reste est liée à ce commerce. Plus nous aurons de visiteurs au Canada, plus grande sera la demande pour les produits des fermes, des forêts, des pêcheries, des mines et des usines et plus ces visiteurs se répandront dans toutes les parties du pays, plus ils contribueront à en faire améliorer les conditions d’existence.

Mais le commerce touristique ne dépend pas du hasard. Les touristes veulent de bonnes routes, de bonnes chambres, d’excellents repas et des amusements. Aucun pays n’a le monopole des choses qui attirent les touristes et il y a beaucoup de concurrence dans l’industrie. Le Canada a plus d’attraits naturels que la plupart des pays, et il devra s’efforcer de les rendre plus attrayants encore par la qualité de ses services. Après la publicité, qui amène les touristes, il faut fournir ce qui a fait l’objet de la publicité. Il ne suffit pas d’avoir de bonnes routes dans une partie du pays, quelques bons points de séjour dans certains endroits de quelques provinces et une bonne table dans quelques hôtels et restaurants : le touriste doit être sûr qu’il trouvera cela raisonnablement bon et à sa portée.

Il est vrai que presque partout au Canada le touriste peut trouver un lit propre et un repas convenable, mais cela ne suffit pas. Sous ce rapport, le Canada fait concurrence à tous les états de l’Union et il est possible de faire des comparaisons frappantes. Prenez par exemple les cabines de touristes : l’année avant la guerre un touriste pouvait voyager d’un bout à l’autre des États-Unis et trouver partout des cabines avec salle de bain, eau chaude, cuisine, cheminées, bons lits et bons meubles, à $1 par personne par nuit. Et, en comparant cela avec les rares cabines à peine meublées qu’il trouvait ici et là au Canada de l’est à l’ouest, quel est le voyageur qui va se donner la peine de réfléchir au fait que l’été canadien est si court que les recettes ne justifient pas la dépense d’un ameublement luxueux ? Pour que les cabines canadiennes plaisent aux touristes, il faut que les Canadiens perdent l’idée qu’il suffit d’un lit, d’une chaise et d’une commode sur un plancher nu, et d’une douche à l’eau froide avec deux cabinets de toilette pour tout le camp. Il est impardonnable et fatal de lésiner sous le rapport de l’hygiène. Le nombre de touristes qui visiteront la région au cours des années suivantes dépend de ce que diront les visiteurs à leur retour chez eux, et la meilleure publicité au monde ne fera pas oublier l’effet des mauvaises impressions.

George A. Martin, président de la section de la villégiature de l’Association des hôtels de l’Ontario dit ceci : « Il faut d’abord faire tous les efforts possibles pour améliorer les normes de service des villégiatures de toutes sortes. De courtes leçons pendant l’hiver pour les employés actuels aideraient à améliorer le présent service. Des cours plus complets devraient être organisés pour ceux qui se destinent à ce métier. L’inspection des places de villégiature, comme le recommande la Convention touristique de l’Ontario, aiderait beaucoup à hausser les normes. »

Les hôtels constituent les plus importants facteurs de l’industrie touristique. Quels que soient les attraits d’un pays, il n’est pas possible d’attirer constamment des touristes sans bons hôtels, parce qu’après ses plaisirs et ses exercices au grand air le visiteur exige une norme raisonnable de confort intérieur – et les normes sont à la hausse dans ce domaine comme dans toutes les sphères d’activité humaine. Il est également vrai que de bons hôtels attirent les touristes dans des endroits moins bien partagés que d’autres sous le rapport des attraits naturels. Les visiteurs reviennent une année après l’autre, et ce sont ces fréquents visiteurs qui sont le plus avantageux car ils font de la réclame parmi leurs amis entre leurs visites.

Les repas devraient offrir les produits naturels et les spécialités de la partie du pays que visite le touriste. La population du Canada est tirée d’un grand nombre de pays et chaque pays a des plats qui lui sont propres. Il ne suffit pas cependant de mettre une enseigne « Cuisine française » à moins de servir des plats français dans une atmosphère française.

Au cours d’une convention de commerce touristique vers la fin de l’année, le ministre des Services nationaux de guerre a ajouté ses recommandations à celles portant sur la grande importance d’améliorer la qualité des hôtels. Il ne s’agit pas ici des grands hôtels métropolitains qui sont aussi bons que les meilleurs du monde, mais ceux qui sont fréquentés particulièrement, et parfois seulement, par les touristes. Ils ont subi d’importantes améliorations au cours des dernières années, il est vrai, mais ils étaient auparavant dans un tel état de médiocrité qu’il reste encore beaucoup à faire. La Gazette de Montréal, dans un commentaire sur la déclaration que le crédit parlementaire accordé l’an dernier dans l’intérêt du commerce touristique serait décuplé après la guerre, a fait la remarque qu’une partie du crédit devrait être affectée à l’amélioration des hôtels sous la surveillance du gouvernement. L’école d’hôtellerie du Québec a insisté sur le fait que la cuisine est la partie la plus importante de l’hôtel et a indiqué la manière de préparer des plats propres à la province.

Les hôtels représentent de gros placements. Environ 93 pour cent du capital entre dans l’édifice, l’outillage, l’installation et l’ameublement, tout cela sujet à intérêt et dépréciation, que les chambres soient occupées ou non. Personne au Canada n’est plus désireux d’attirer des touristes en été comme en hiver, du Canada ou de l’étranger, que les propriétaires d’hôtels, de stations de villégiature, de camps et de cabines. Mais il faut de l’imagination pour cela. Rien ne sert d’imiter servilement ce qu’on fait aux États-Unis : le touriste qui vient des États-Unis ne se contentera pas d’une imitation, si bonne qu’elle soit (et il y en a de bien mauvaises), de ce qu’il est habitué à voir dans son pays – même si elle est décorée d’un drapeau américain. Il ne tient pas à visiter des cafés et des hôtels calqués sur un modèle américain, parfois même jusqu’au nom. Nous avons notre manière de vivre au Canada – faisons-la connaître aux visiteurs.

Le Canada a tellement de beautés naturelles que nous ne nous sommes pas encore aperçus de notre manque d’imagination et d’habileté à en inventer d’autres. Il sera cependant essentiel, après la guerre, de tirer le plus grand parti possible de tous les attraits. Tous les gouvernements devront faire plus grand usage de nos ressources scéniques, historiques et culturelles par l’achat et la rénovation d’anciennes demeures, champs de batailles, musées et sites remarquables. De nombreux forts ont été restaurés depuis une vingtaine d’années et ont attiré des milliers de visiteurs. On peut les rendre plus attrayants encore par des renseignements sur l’usage, par exemple, de la poterne, des embrasures, des travaux de défense et de la raison pour laquelle le fort a été construit à cet endroit et sous cette forme. Les batailles livrées autour du fort peuvent être décrites sur des tableaux muraux, comme celle de Waterloo dans le fameux cyclorama de ce champ de bataille. Des flèches sur les remblais, comme celles sur la colline de Westmount, peuvent indiquer les endroits où les combats ont eu lieu. Les touristes seront enchantés de suivre les événements de leur histoire et de la nôtre.

Les traditions indiennes intéresseraient également les touristes. On pourrait organiser dans de nombreuses parties du Canada des cérémonies indiennes et des spectacles historiques avec les costumes de l’époque, sans avoir besoin de les faire durer une semaine comme au Nouveau Mexique, mais deux heures par exemple à certaines époques, en suivant de près l’histoire et les coutumes locales.

Les parcs nationaux du Canada ont commencé petitement il y a près de 60 ans et nous en avons aujourd’hui 26 qui invitent les visiteurs dans toutes les provinces. Ils ont une superficie d’environ 30,000 milles carrés et appartiennent tous au gouvernement fédéral qui les administre. Tout dernièrement, on vient de mettre à part 10,000 milles carrés le long de la route de l’Alaska dans le territoire du Yukon ; le Québec a offert deux sites, le Nouveau-Brunswick un, et il est question d’un parc le long de la mer en Colombie-Britannique. Ce réseau de parcs, même sans les projets d’agrandissement, est un des plus grands et des plus beaux au monde. Les pares comprennent des régions d’une beauté scénique remarquable, de phénomènes naturels, d’intérêt historique et unique sous le rapport de la faune et de la flore. Les animaux sauvages du pays y vivent à l’état naturel. Ce sont des endroits sans pareils pour passer les vacances, quel que soit le genre de vie au grand air que l’on préfère. Ce qui nous manque ce sont les petits parcs au bord des routes, avec des cabinets de toilette et des installations pour faire cuire les repas.

Depuis plus de 10 ans la Canadian Youth Hostels Association met ses installations et ses services à la disposition des jeunes gens qui aiment la vie au grand air, et presque chaque province a son réseau d’hôtels. Ceux-ci contiennent des dortoirs séparés pour les filles et les garçons, des lavabos séparés, une cuisine et un réfectoire en commun. L’hôtel fournit couchettes, matelas, couvertures et ustensiles de cuisine, généralement dans une ferme où le fermier et la fermière servent de parents et de surveillants pour un petit honoraire. Les hôtes voyagent à pied ou à bicyclette, seuls ou en compagnie. Des groupes se forment généralement le long de la route et se divisent le travail – les achats, la cuisine, etc., par tirage au sort ou suivant les aptitudes. La soirée se passe à nager, à chanter autour d’un feu de camp, et ainsi de suite. Pour renseignements sur ces hôtels s’adresser au secrétaire, C.Y.H. Association, 51 Yonge Street, Toronto.

Les Canadiens commencent juste à se rendre compte de la valeur de leurs hivers sous le rapport des amusements. Tout de suite après la guerre, il y aura une plus grande chance que jamais de mettre en valeur les stations hivernales, parce que tant de jeunes gens auront été habitués par la guerre à la vie au grand air. Il y aura un grand désir de s’adonner aux sports d’hiver, non seulement par ceux qui ont appris à faire du ski dans les postes du nord, mais par ceux qui cherchent un changement de climat après avoir servi dans le midi. L’exploitation des petits hôtels et des cabines pendant l’hiver permettra aux propriétaires de faire des améliorations que n’aurait pas justifiées à elle seule une courte exploitation pendant l’été.

Comment le Canada peut-il s’y prendre pour attirer un plus grand nombre de touristes américains ? La tâche de faire connaître aux citoyens des États-Unis ce que le Canada est en mesure de leur offrir pour passer leurs vacances doit être attaquée d’une manière hardie, avec grands effets dramatiques. Les Américains sont habitués à faire les choses en grand, et une invitation en langage ordinaire tomberait à plat. Il faut s’y prendre en masse, enrôler autant de citoyens canadiens que possible, et faire usage de tous les moyens connus par la gravure et par les mots. Il faut non pas seulement prier les Canadiens d’inviter leurs amis du delà de la frontière, mais les organiser à cet effet. On pourrait faire écrire aux élèves de toutes les écoles des lettres d’invitation qui seraient distribuées aux élèves des écoles américaines. Les journaux quotidiens et hebdomadaires seraient très heureux de s’associer à l’entreprise, donneraient probablement des prix aux auteurs des meilleures lettres dans leur région et publieraient quelques-unes des réponses. Un plan de ce genre grandirait tout seul ; un énorme échange de correspondance en résulterait ; les journaux des États-Unis publieraient eux aussi quelques lettres et cela ferait plus de publicité. Cette croisade plairait aux directeurs de journaux parce qu’elle ferait participer les enfants à la tentative d’améliorer le bien-être du Canada, et aux instituteurs, parce qu’elle ferait mieux connaître le Canada et les États-Unis aux élèves. Elle aurait également une portée sociale, en vue de l’intérêt croissant que ces deux pays sont forcés de se porter l’un à l’autre.

Rien ne sert d’essayer d’attirer le plus grand nombre possible de touristes au Canada et de faire en sorte en même temps d’empêcher nos concitoyens de visiter leurs voisins. Ce serait là une aussi grande erreur économique que d’essayer d’exporter tout ce que nous pouvons sans rien importer de notre côté. Aucun pays ne peut vivre tout seul ; sa prospérité est étroitement liée à celle de tous les pays. C’est selon la manière dont deux pays apprennent à se connaître et trouvent des ressemblances frappantes entre leurs aspirations et leurs tendances qu’ils deviennent amis et bienveillants, dans un monde où l’amitié et la bienveillance entre les nations acquièrent de plus en plus d’importance. L’échange de citoyens en vacances entre le Canada et les États-Unis, sur une échelle beaucoup plus grande que même les grandes migrations du passé, fera disparaître ce qui reste encore de contrainte nationale et fera naître la sympathie et l’accord. Les bonnes relations qui existent entre le Canada et les États-Unis depuis si longtemps, et ont si bien résisté aux épreuves de la guerre, découlent des bonnes relations entre les Canadiens et les Américains comme gens. Il n’y a pas deux autres pays au monde où tant de touristes aient traversé la frontière commune. Dans une seule année, 16 millions de touristes américains sont venus au Canada, et le Canada, avec un douzième de la population des États-Unis, a envoyé 2,800,000 visiteurs chez son voisin, soit 96.6 pour cent du nombre total des visiteurs aux États-Unis cette année-là.

Cela pourrait servir de texte pour un sermon en faveur d’un monde nouveau. Il n’existe pas sur la terre de force plus puissante que le tourisme pour dissiper les craintes et les haines des nations. La culture nationale s’épanouit également sous l’effet des idées transportées d’un côté et de l’autre de la frontière et dans l’intérieur du pays même ; le provincialisme disparaît, les problèmes deviennent faciles à comprendre, et l’esprit d’entente, nourri par l’amitié personnelle, remplace les préjugés. Sous ce rapport, ainsi que pour des raisons commerciales, les offices et les organisations du tourisme dans tout le Canada méritent l’appui chaleureux de tout le monde.

Aujourd’hui que toutes les routes conduisent jusqu’au bout du monde, on prescrit les voyages pour tous les maux du corps et de l’esprit parce que les nouveaux paysages et les nouvelles idées procurent la distraction et l’oubli. Le citoyen de demain sera un grand voyageur. Il exigera ce qu’il y a de mieux comme moyen de transport par chemin de fer, par route, par eau et par air. Il demandera du confort et de bons repas. Il en voudra pour son argent et sa clientèle donnera lieu à grande concurrence. Le Canada aura une excellente opportunité de satisfaire ses demandes pendant la période de reconstruction. C’est pourquoi l’industrie touristique devrait avoir priorité dans les programmes d’après-guerre. Le Canada est un pays avec de nombreuses portes d’entrée, mais sans barrières. L’accès en est facile aux hommes et aux femmes de bonne volonté.