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Une épine dans le pied de la Fed : les répercussions possibles des droits de douane sur l’inflation et la croissance aux États-Unis

Le 2 avril (« jour de la libération »), le président Trump a annoncé, depuis la roseraie de la Maison-Blanche, des droits de douane « réciproques » étendus, imposant des mesures ciblées à un vaste éventail de partenaires commerciaux et des droits de douane généraux de 10 % à pratiquement tous les pays. Le Canada et le Mexique s’en sont sortis relativement indemnes, les exemptions de l’AEUMC étant toujours en vigueur. Cette fois-ci, ce sont les pays du Sud-Est asiatique qui ont été les plus fortement touchés. L’annonce a fait passer le tarif douanier effectif moyen des États-Unis à 24 %, comparativement à 6,2 % en mars et à 2,4 % en 2024. Compte tenu du grand nombre de pays ciblés, il est difficile de repérer les issues immédiates. Si ces droits de douane restent en place dans les mois à venir, nous nous attendons à une forte pression à la hausse sur l’inflation et à des chocs négatifs sur la croissance. Nous expliquons ci-dessous comment cette situation pourrait influer sur la trajectoire de l’inflation et peser sur la croissance des États-Unis dans une série de scénarios possibles.

L’inflation de base pourrait approcher 4 % si les droits de douane actuels sont maintenus

Les biens et services importés de l’étranger représentent environ 10 % de la consommation aux États-Unis. Compte tenu de l’ampleur des droits de douane, il sera relativement difficile pour les consommateurs de remplacer les marchandises importées à court terme. Par exemple, la technologie américaine nécessite dans bien des cas des puces provenant d’Asie et la plupart des usines textiles se trouvent au-delà des frontières américaines. Nous avons expliqué quelle sera l’incidence des droits de douane de 25 % sur le prix des voitures neuves ici – mais en dehors du secteur automobile, les droits de douane « réciproques » auront des répercussions sur l’ameublement (y compris les meubles scandinaves), les produits de loisirs (y compris les jouets pour enfants provenant en grande partie d’Asie) et les fournitures médicales d’Europe, entre autres. Nous prévoyons une forte hausse de l’inflation des produits de base dès le mois de mai. Celle-ci se traduirait par une augmentation sensible de l’inflation de base et de l’inflation globale. Par rapport à nos prévisions de base (avant l’annonce des droits de douane, nous tablions sur une inflation de base de 2,7 % sur 12 mois à la fin de l’année), nous avons modélisé deux scénarios probables de risque tarifaire :

  • Droits de douane généralisés de 10 %, droits de 25 % sur les automobiles et de 20 % sur l’acier et l’aluminium (*y compris les exemptions de l’AEUMC)

  • Droits de douane généralisés de 20 %, droits de 25 % sur les automobiles et de 20 % sur l’acier et l’aluminium (*y compris les exemptions de l’AEUMC)

L’ampleur des droits de douane a son importance ! Dans le premier scénario, des droits de douane généralisés de 10 % (à l’exception des automobiles, de l’acier et de l’aluminium) pourraient faire grimper l’inflation de base à 3,5 % sur 12 mois au deuxième trimestre et probablement à 3,3 % sur 12 mois à la fin de l’année, ce qui dépasse largement le taux de 2,7 % prévu dans notre scénario de base. Le second scénario, davantage conforme au contexte actuel et caractérisé par des droits de douane plus élevés, ferait plafonner l’inflation à 3,8 % sur 12 mois, celle-ci s’établissant probablement à 3,7 % sur 12 mois à la fin de l’année, selon nos modèles.

Une hausse de l’inflation freinera la croissance américaine en 2025

Avant les menaces de droits de douane, la croissance aux États-Unis ralentissait, mais elle demeurait solide. L’incertitude entourant les droits de douane a ébranlé la confiance des consommateurs, créant une divergence entre les données économiques « subjectives » et « objectives ». Si les droits de douane sont imposés durablement, ils entraîneront probablement un choc des prix plus permanent qui réduirait l’écart entre ces données objectives et subjectives, ce qui entraînera une détérioration des données objectives. La pression à la hausse sur les prix continuera d’effriter le pouvoir d’achat des consommateurs et un nouveau recul des marchés boursiers devrait dissuader rapidement les personnes à revenu élevé de dépenser en raison d’un effet défavorable sur la richesse.

Dans un contexte inflationniste, les déflateurs seront cruciaux. La hausse des prix (et des déflateurs de plus grande ampleur) aura des répercussions sur la croissance réelle. Si la croissance nominale témoigne de l’activité des consommateurs, après ajustement en fonction de la hausse des prix, la croissance réelle semblera bien plus faible. Le premier scénario pourrait donner lieu à un ralentissement considérable de la croissance en 2025, susceptible de se traduire par une croissance annuelle nulle, tandis que le second scénario augmenterait considérablement la probabilité d’une récession technique cette année.

Pour l’instant, la Réserve fédérale surveillera la situation avec anxiété, tout en restant sur la touche

La Fed sera aux prises avec des priorités conflictuelles – l’accélération des prix et le ralentissement de la croissance – et restera tributaire des données économiques pour déterminer quel mandat nécessite une intervention plus rapide. Bien qu’un ralentissement de la croissance (et une hausse possible du taux de chômage) entraînerait un risque de baisse du taux des fonds fédéraux, il serait difficile d’envisager un abaissement des taux par la Fed lorsque l’inflation de base approche 4 % (sans parler du fait que l’opinion publique n’acceptera probablement pas cette situation comme « transitoire »). Pour déterminer l’orientation du taux directeur, la Fed devra évaluer les risques relatifs afin de déterminer quelle préoccupation a le plus de poids. D’ici là, nous nous attendons à ce que les membres du comité de l’open market surveillent les choses de près, tout en restant sur la touche et sans modifier les taux dans un avenir prévisible.



Mike Reid est premier économiste, États-Unis, à RBC. Il est chargé d’établir les perspectives économiques de RBC pour les États-Unis, de commenter les indicateurs macroéconomiques et de rédiger des analyses concernant le contexte économique.

Carrie Freestone fait partie du groupe d’Analyse macroéconomique et est responsable d’examiner les principales tendances économiques, notamment les dépenses de consommation, les marchés du travail, le PIB et l’inflation.

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