Dans le numéro de cette semaine : Un plan d’action pour les minéraux critiques ; la diversification des échanges commerciaux n’est peut-être pas une panacée ; les droits de douane exacerbent l’insécurité alimentaire
À noter
Par John Stackhouse
Mark Carney a survécu au G7. Le sommet de Kannaski aurait pu être un désastre commercial, mais Donald Trump avait manifestement d’autres chats à fouetter. Le Canada, ou les autres pays participants de la rencontre ne peuvent, pour autant, pas crier victoire. En voici les raisons, et ce qu’on entend :
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Il n’était pas prévu que le Canada et les États-Unis signent une entente au sommet du G7 puisque DJT n’allait tout de même pas annoncer un élément aussi important de son programme national en sol étranger (à moins, bien sûr, d’y avoir planté le drapeau étoilé.)
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L’on a ensuite estimé que les deux pays pourraient conclure une entente dans un délai de 30 jours, ce qui est un objectif fort ambitieux. Tous ceux qui ont eu affaire à Trump savent que le président fait fi des délais et se sert du temps comme un outil de négociation. On ne signe pas si on n’y est pas obligé. L’équipe Carney voit maintenant sa plus grande préoccupation se concrétiser, avec le président des États-Unis qui se laisse distraire par les événements. L’on parle par exemple d’une guerre au Moyen-Orient.
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Certains intervenants du côté canadien ne s’en inquiètent pas, estimant que cette stratégie qui consiste à « faire traîner le jeu » permettra au Canada d’entamer des discussions plus approfondies sur l’Accord États-Unis–Mexique–Canada (AEUMC) à l’automne.
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D’autres Canadiens craignent toutefois que cela accentue l’impact des droits réciproques. Il est beau de « jouer du coude » jusqu’à ce qu’on bouscule un membre de sa propre équipe. En clair, le Canada souffre plus de la guerre des droits de douane que les États-Unis à l’heure actuelle.
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Et plus l’incertitude se prolonge, plus il sera difficile pour le Canada d’attirer des investissements.
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À plus long terme, le Canada reste dans la mire des études sectorielles de M. Trump, et cela ne fera que compliquer les choses pour nos exportations dans les cinq catégories de base : automobiles, acier/aluminium, bois d’œuvre, produits pharmaceutiques et semi-conducteurs.
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Comme l’a dit quelqu’un dans Zone commerciale : « On est mal parti pour négocier lorsque le partenaire de négociation se montre impitoyable. »
La semaine écoulée
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Les États-Unis et le Canada souhaiteraient conclure une entente dans les 30 jours. M. Carney a laissé entendre que le Canada imposerait des droits de douane réciproques si les deux pays ne parviennent à aucun accord.
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Le Canada prend des mesures sévères pour contrer l’importation d’acier étranger bon marché afin de soutenir ses producteurs d’acier, frappés par les droits de douane de 50 % imposés par M. Trump.
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Le volume de camions commerciaux entrant aux États-Unis en provenance du Canada a baissé de plus de 10 % au cours des deux derniers mois par rapport à 2024. Par contre, le nombre des camions en provenance du Mexique et à destination des États-Unis n’a baissé que de 2,8 % en mai (et de 6,4 % en avril).
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Le secrétaire d’État britannique au Commerce a déclaré que les efforts visant à obtenir un allègement pour les exportations d’acier vers les États-Unis seraient intégrés dans des négociations plus larges, laissant ainsi entendre qu’il y avait encore beaucoup à faire en ce qui concerne l’accord commercial récemment annoncé entre les États-Unis et le Royaume-Uni.
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La Réserve fédérale américaine a maintenu les taux inchangés et déclaré qu’elle suivrait de près l’impact des droits de douane cet été.
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Les mises en chantier aux États-Unis ont atteint un creux en cinq ans en mai, en raison de l’imposition des droits de douane sur les matériaux de construction importés.
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La Chine a retiré les États-Unis des pays vers lesquels elle exporte ses marchandises, mais a réussi à porter son excédent commercial global à 500 milliards de dollars américains depuis le début de l’année, affichant ainsi une hausse de 40 % par rapport à l’an dernier.
Les minéraux à l’ordre du jour du G7
Cette semaine, les dirigeants du G7 ont dévoilé un plan d’action pour les minéraux critiques afin de contrer les distorsions de marché, d’accroître la transparence des chaînes logistiques et de réduire la dépendance stratégique à l’égard de Pékin. Nous avons peu de détails à ce sujet, mais certains éléments clés correspondent aux renseignements fournis dans notre rapport Le nouveau grand jeu :
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Restreindre les distorsions de prix : Les membres du G7 se sont engagés à coordonner leurs interventions face aux perturbations de l’approvisionnement et à améliorer la transparence et la traçabilité des marchés. Aucune mention explicite d’une « prime à la Chine » ou d’un prix plancher n’est faite, mais il y a tout de même une évolution positive.
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Débloquer des financements : Encourager les banques de développement, les agences de crédit à l’exportation et les sociétés de capitaux privés à accélérer les investissements en amont dans les pays du G7 et les marchés émergents alliés.
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Traçabilité de la chaîne logistique, établissement de normes et durabilité : Une feuille de route du G7, prévue pour la fin de l’année, vise à créer des critères de référence pour garantir une exploitation minière responsable, des mesures de protection de l’environnement et des normes du travail.
Le Canada reste un acteur central dans le secteur des ressources minières, capable de répondre aux besoins croissants de l’Europe et des États-Unis en matière de défense et de nouvelles énergies, ce qui constitue un avantage naturel dans les négociations commerciales avec les États-Unis et ses partenaires. D’autres efforts, comme la hausse de la capacité de raffinage, visant à renforcer le reste de la chaîne de valeur, viendront renforcer l’avantage du Canada en matière de ressources.
Pourquoi la diversification des échanges commerciaux n’est peut-être pas une panacée
Au vu du conflit avec les États-Unis, la diversification des partenaires commerciaux est devenue un sujet d’actualité. L’abaissement des barrières que constituent les droits de douane est une mesure économiquement rationnelle qui ne suffit pas, à elle seule, d’augmenter les volumes d’exportations.
Les conservateurs de M. Harper ont conclu des accords commerciaux bilatéraux avec toute une série de pays et de blocs économiques, notamment avec l’Europe (AECG), l’Asie-Pacifique (PTPGP) et un grand nombre de pays d’Amérique latine. Pourtant, seulement 4 % des exportations canadiennes sont destinées à l’UE et 6 % aux pays du PTPGP, des ratios qui n’ont pas évolué depuis plus de deux décennies.
Parallèlement, près de 80 % des exportations canadiennes sont destinés aux États-Unis. La dépendance du Canada à l’égard de quelques grands secteurs comme l’énergie, l’automobile et les métaux ne fait qu’accentuer cette dépendance. Le Canada a besoin d’une stratégie commerciale intégrée qui diversifie les partenaires commerciaux tout en renforçant la compétitivité des exportations. Le délai de 30 jours entre Carney et Trump pour conclure un accord est donc encore plus important.
Guerre commerciale et sécurité alimentaire
Un Canadien sur quatre est confronté à l’insécurité alimentaire ; un taux jamais vu au pays. C’est un problème d’accessibilité que les droits de douane et l’incertitude commerciale persistante risquent d’aggraver.
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Les pertes d’emploi et l’insécurité obligent de nombreuses personnes à faire des choix difficiles : Entre janvier et mai, le secteur manufacturier canadien a perdu 54 000 emplois et le taux de chômage du pays s’est hissé à 7 %, ce qui représente son sommet depuis 2016, exception faite de la pandémie.
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La hausse du coût de la vie menace d’aggraver la crise de l’insécurité alimentaire. Cela dit, il ne s’agit pas seulement d’emplois : plus de 60 % des ménages en situation d’insécurité alimentaire dépendent d’un salaire ou d’un revenu d’un travail indépendant pour subvenir à leurs besoins.
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Les perturbations de la chaîne logistique ont un impact sur la cohérence et les coûts des produits alimentaires : Aux États-Unis, on estime que les droits de douane augmenteront les prix des denrées alimentaires de 2,6 % à court terme, les prix des fruits et légumes devant grimper de 5,4 %.
Dans notre dernier rapport, Alimenter la crise : l’incidence des droits de douane sur l’insécurité alimentaire – Nous présentons trois solutions potentielles, toutes liées aux ambitions de croissance du Canada.
Conclusion
« Si les droits de douane et droits de douane réciproques actuels sont maintenus, l’expérience passée porte à croire qu’environ 75 % des coûts des droits de douane auront des répercussions pendant environ un an et demi. »
–Tiff Macklem, gouverneur de la Banque du Canada, lors d’un discours prononcé cette semaine à St. John’s, Terre-Neuve.
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