
Six semaines se sont écoulées depuis que le gouvernement fédéral canadien a publié le budget 2025 et la plupart des provinces ont maintenant publié des mises à jour semestrielles. Compte tenu de cette nouvelle série de plans budgétaires et des données récentes qui laissent entendre que l’économie est plus forte que prévu, nous examinons les trajectoires budgétaires fédérale et provinciales combinées et leur effet sur les perspectives.
La résilience de l’économie améliore la situation budgétaire combinée, même si les déficits prévus augmentent
Une croissance économique supérieure aux attentes a amélioré les déficits définitifs des comptes publics de 2024-2025 pour le gouvernement fédéral et ceux des provinces, collectivement, par rapport à leurs plus récentes projections (arrondies ici). Le solde budgétaire combiné a ainsi totalisé -1,4 % du produit intérieur brut (PIB) en 2024-2025 par rapport aux prévisions de -2,0 %.
Le budget fédéral a par ailleurs augmenté les déficits combinés prévus pour 2025-2026 pour les établir à 3,5 % du PIB, soit plus que le scénario de hausse de 3 % de notre aperçu précédent associé aux dépenses totales de la plateforme fédérale. Si les attentes se concrétisent, il s’agira du déficit combiné le plus important depuis le début des années 1990, à l’exception de la pandémie de COVID-19 et de la crise financière mondiale. Les déficits prévus se rapprochent des prévisions antérieures pour les années suivantes, à 2,5 % en 2026-2027 et à 1,9 % en 2027-20281.
Même si les prévisions budgétaires pour 2025-2026 sont récentes, certaines ont été publiées avant les plus récentes bonnes nouvelles au sujet de l’économie canadienne, notamment une forte croissance du PIB au troisième trimestre de 2025. Il s’agit d’un écart entre les prévisions actuelles de croissance du PIB nominal et celles qui sont intégrées dans les documents budgétaires.
Si l’on tentait d’harmoniser les soldes budgétaires du gouvernement fédéral et de ceux des quatre grandes provinces aux plus récentes prévisions de Services économiques RBC, on obtiendrait plutôt des déficits combinés de 3,3 % du PIB en 2025-2026 et de 2,3 % en 2026-2027, soit des déficits inférieurs de 0,2 point de pourcentage par rapport au nouveau scénario de base2. Il ne s’agit pas d’une situation dramatique, mais elle représente bien la résilience économique surprenante du Canada.
Les déficits fédéraux prévus augmentent, mais les dépenses sont reportées
Jusqu’ici, les comptes fédéraux ne suivent pas l’importante expansion du déficit de 2025-2026
Pour le premier semestre de l’année, le Moniteur des finances publiques montre que le déficit fédéral a augmenté de moins de 25 % sur 12 mois, alors que le budget prévoyait qu’il augmenterait de plus du double (de 36 G$ en 2024-2025 à 78 G$). Il s’agit d’une dynamique de revenus et de dépenses qui devrait s’atténuer en partie pendant le reste de l’année, même s’il existe un risque que le déficit soit plus faible en 2025-2026.
Les revenus sont à jour malgré une légère baisse prévue pour l’ensemble de l’année dans le budget, le tout en raison d’excellentes recettes provenant de l’impôt des sociétés. Cette tendance devrait s’inverser en partie à mesure que l’exercice financier progressera, mais elle pourrait être un autre signe d’une plus grande résilience de l’économie canadienne. Même si la croissance des revenus ralentit, nos récentes perspectives laissent croire que le déficit fédéral pourrait être inférieur de près de 5 milliards de dollars aux prévisions en raison d’une croissance économique plus forte que celle prévue dans le budget.
Les dépenses sont également à la traîne, mais elles devraient commencer à s’accélérer. Même si le projet de loi d’exécution du budget ne sera pas adopté avant la fin de janvier (en raison de l’ajournement de la Chambre des communes pour le congé des fêtes), une autorisation de dépenses d’au moins la moitié des nouvelles mesures budgétaires de 29 milliards de dollars a déjà été accordée depuis le début de l’été3. Qui plus est, bien que la hausse des dépenses en immobilisations soit l’un des principaux thèmes du budget, la majorité des dépenses prévues pour 2025-2026 sont des dépenses d’exploitation, notamment en défense, ce qui laisse entrevoir une trajectoire de déploiement potentiellement plus facile une fois que les dépenses auront été autorisées.
Il semble néanmoins peu probable que toutes les dépenses prévues puissent être engagées au cours de l’année. Il ne devrait par ailleurs pas y avoir d’augmentation importante des dépenses de l’exercice 2025-2026 dans l’année civile 2025; elles seront plutôt encourues en 2026.
Si les dépenses sont reportées à 2026-2027 et au-delà, elles pourraient survenir dans un contexte économique différent
En plus d’un possible report des dépenses par rapport aux plans de 2025-2026, les dépenses de 2026-2027 et des années ultérieures pourraient également être retardées en raison de la part plus importante attribuable aux dépenses en immobilisation et en défense. Si l’on ajoute à cela le risque d’exécution du côté des économies d’exploitation, où des réductions de dépenses ministérielles tardives pourraient être plus difficiles à obtenir, les déficits futurs risquent d’être plus importants4, et ce, même si certaines dépenses reportées pourraient ne pas se matérialiser.
L’économie dispose d’une capacité excédentaire à court terme pour absorber certaines mesures budgétaires. Toutefois, les données récentes laissent également entendre que l’écart de production est plus faible que prévu. Nous prévoyons que l’économie canadienne se redressera en 2026 et que l’écart de production se refermera progressivement. Les dépenses reportées pourraient donc survenir lorsque l’économie canadienne sera déjà beaucoup plus forte.
Compte tenu de l’incertitude entourant le niveau et le calendrier des déficits fédéraux, nous n’avons apporté aucun changement à la « contribution budgétaire » au PIB dans nos perspectives qui prévoyaient déjà une croissance de 0,4 point de pourcentage pour 2025 et 2026.
Les mises à jour de toutes les provinces comprennent des révisions à la baisse pour 2025-2026, sauf pour l’Ontario et le Québec
Nous continuons de souligner que le soutien budgétaire n’est pas seulement l’affaire du fédéral, mais aussi des provinces. C’est pourquoi nos analyses visent à combiner les déficits fédéraux et provinciaux. Et même si le gouvernement fédéral peut s’attendre à ce que l’amélioration de la croissance (et le report des dépenses) atténue l’aggravation du déficit, toutes les provinces ne se retrouvent pas dans la même situation.
En raison de la vigueur plus importante que prévu de l’économie, les déficits pour 2024-2025 de plusieurs d’entre elles ont été inférieurs aux prévisions des budgets 2025. Seule la Colombie-Britannique a enregistré une hausse importante de son déficit. Terre-Neuve-et-Labrador (T.-N.-L.) et le Manitoba ont affiché des variations légèrement négatives.
La croissance plus forte s’est poursuivie en 2025-2026, ce qui a entraîné une amélioration globale du déficit dans les mises à jour de milieu d’année en Ontario et au Québec. Les plus petites provinces s’attendent toutefois à des déficits plus élevés que ceux prévus dans leur budget 20255. T.-N.-L., l’Alberta, la Nouvelle-Écosse, le Nouveau-Brunswick (N.-B.) et la Saskatchewan (Sask.) ont connu des révisions à la baisse importantes, la diminution des prix de l’énergie pesant sur les deux premières. La hausse des dépenses liées à la santé a eu une incidence sur les trois dernières, le N.-B. a également subi une baisse des revenus fiscaux et la Sask. a été touchée par les dépenses liées aux feux de forêt.
Au total, les déficits provinciaux prévus pour 2025-2026 sont passés de 32 G$ à 35 G$ (excluant les éventualités), ce qui représente 1,1 % du PIB. Au-delà de 2025-2026, l’Ontario et le Québec sont les seules provinces à avoir fourni des données à jour : leur déficit est demeuré pratiquement inchangé par rapport aux budgets 2025.
Cynthia Leach est économiste en chef adjointe à RBC et responsable de l’analyse économique et politique structurelle de l’équipe. Elle a rejoint l’équipe en 2020.
- Comme auparavant, les déficits publiés sont recalculés afin d’éliminer les réserves pour éventualités qui les font grimper, car elles masquent le rendement de base prévu. Le rajout des réserves pour éventualités a une incidence sur les soldes budgétaires provinciaux et porterait les déficits combinés à 3,9 % en 2025-2026, à 2,9 % en 2026-2027 et à 2,3 % en 2027-2028. ↩︎
- Les quatre grandes provinces (l’Ontario, le Québec, l’Alberta et la Colombie-Britannique) représentent ensemble environ 90 % du PIB canadien et des déficits prévus. Les prévisions économiques publiées et les variables budgétaires sensibles ont servi à rajuster la croissance du PIB nominal et les taux d’intérêt. ↩︎
- Cela comprend les dépenses de défense, les baisses d’impôt et certaines annonces prébudgétaires. En ce qui concerne les réductions d’impôt, le projet de loi C-4 a été adopté par la Chambre des communes, mais pas encore par le Sénat, et il n’a toujours pas reçu la sanction royale. Toutefois, conformément à la convention, l’Agence du revenu du Canada intègre déjà les modifications à partir du 1er juillet 2025. ↩︎
- Il convient également de noter que le budget fédéral 2025 prévoit des dépenses non budgétaires importantes qui pourraient stimuler l’économie, mais qui sont également touchées par des questions de déploiement. On parle notamment de dépenses de trésorerie supplémentaires de 20 milliards de dollars en défense liées à des actifs amortis et à divers programmes de prêt par l’intermédiaire de sociétés d’État fédérales. ↩︎
- L’Î.-P.-É., qui n’a pas encore publié de mise à jour d’automne ↩︎
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